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LINDSAY HUNTER |
Mauvaises GrainesAux éditions SERIE NOIREVisitez leur site |
505Lectures depuisLe vendredi 23 Novembre 2018
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Une lecture de |
Une bourgade américaine du côté de nulle part. Deux lycéennes, Dayna et Perry, aux caractères assez différents, mais animées d’une forme confuse de rébellion. Surnommée Baby Girl, Dayna cultive un look décalé, marginal, provocateur. Elle habite avec son frère Charles dans “un quartier plein de maisons grises et marron, et de gens polis sur le seuil…” Baby Girl préfère l’endroit où loge Perry, parsemé de caravanes et de mobil-homes. Habitations précaires et modestes, mais “plus facile d’y être une fille au crâne à moitié rasé qu’en avait rien à foutre, juste un spécimen de plus parmi les différentes espèces qui peuplaient le terrain.” Perry vit là avec sa mère Myra, vaguement serveuse dans un restaurant routier du coin, et le deuxième mari de celle-ci, Jim Tipton – gardien de prison dans les environs. Myra s’alcoolise à la bière plus souvent qu’à son tour. La nuit, Baby Girl et Perry s’offrent souvent en cachette des virées en voitures volées. La technique pour dérober des véhicules, c’est avec son frère Charles que Baby Girl l’a apprise. Suite à un accident, ce dernier ne dispose plus de toutes ses capacités mentales et physiques. Ces sorties nocturnes ne riment pas à grand-chose, et ne les mènent pas bien loin de leurs quartiers. Sentiment fort relatif d’une liberté, qui pourrait finir par leur causer des soucis avec la police – jusqu’à la garde à vue. Perry apprécie quand elles font des pauses au bistrot Denny’s, où un garçon de sa classe occupe un emploi subalterne. Toutefois, ce Travis semble à peine remarquer Perry. Elle doit se contenter de fantasmer sur lui durant les cours. Ce sera sûrement à elle de prendre l’initiative le moment venu. Jamey vit avec sa mère dans le parc de mobil-homes, pas très loin de chez Perry. Voilà quelques temps qu’il est entré en contact via les réseaux sociaux avec Baby Girl et Perry. L’anonymat d’Internet permet une approche prudente, qui laisse supposer que ce Jamey est soit timide, soit plutôt laid. C’est généralement lui qui relance les deux lycéennes. Il les observe, aussi : “Depuis sa planque, Jamey regarda la voiture déboîter. Perry se léchait les doigts et sa copines secouait la tête au rythmes lourds des beats qui cognaient jusqu’à ses sinus, puis tout s’évanouit en même temps que la voiture s’éloignait.” Jim Tipton garde un œil protecteur sur sa belle-fille Perry, ainsi que sur Dayna, mais sans garantie de leur éviter de faire des bêtises. Par ailleurs, ce n’est pas son job à la prison qui lui apportera la moindre satisfaction, tant l’ambiance y est glauque. Une rencontre entre les lycéennes et Jamey comporte de gros risques de mal finir… (Extrait) “Le plan, c’était que Perry détourne l’attention de l’employé à la caisse. En espérant que ce soit un homme, pour qu’elle n’ait pas trop à se fatiguer pour le retenir. Juste promener sa chevelure dans le coin, croiser les bras pour que son tee-shirt moule sa poitrine, et demander l’heure. Elles étaient entrées séparément, Baby Girl une trentaine de secondes après Perry. Une fois à l’intérieur, Perry vit qu’une vieille tenait la caisse, un nuage de cheveux teints en rose, une bouche si attaquée de rides qu’on aurait dit qu’elle avait eu les lèvres suturées et que ça n’avait jamais cicatrisé.” C’est un roman noir au sens premier du mot que nous présente Lindsay Hunter. De ces intrigues qui vont fatalement mal tourner. Reste à savoir pour qui, à quelle vitesse et dans quelles circonstances. Ces deux adolescentes paumées, qui s’ennuient ferme et se croient rebelles, sont le déclencheur de l’affaire. Des mauvaises graines de délinquantes irrécupérables, vraiment ? Elles n’ont ni éducation, ni avenir, c’est un fait. Elles ne se posent pas de questions sur leur futur, d’ailleurs. Mais si Baby Girl apparaît plus agressive, voire enragée, Perry est une jeune fille qui devrait avoir un parcours de vie simple – sans éclat, évidemment. L’auteure ne dresse pas un portrait sociologique de ses personnages, qui prétendrait décrire une Amérique actuelle, de sa jeunesse. C’est en montrant les faits par petites touches qu’elle installe une ambiance particulière, d’un réalisme sombre. Une curiosité, à laquelle on adhère en prenant le rythme de la tonalité narrative.
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