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JEREMIE GUEZ |
Paris La NuitAux éditions J AI LU |
1087Lectures depuisLe vendredi 24 Mars 2012
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Une lecture de |
Paris Nord, c’est le territoire d’Abraham depuis toujours. “Longtemps j’ai cru que l’existence c’était ça, ce bordel incessant. Ce n’est qu’en vieillissant que je me suis rendu compte que le bruit n’est inhérent qu’à la pauvreté. Cette fureur qui s’autoalimente est créée par le manque d’éducation, la violence et l’absence totale d’intimité. Dans ma rue, le repos est interdit, et on grandit tous de la même façon.” Abraham loge chez son père, vit de combines et de petits trafic, se drogue un peu. Il a une petite amie étudiante, Julia. Goran est son meilleur copain depuis l’enfance. Toujours de connivence, ils partagent certains moments excitants, telle cette baston à Pigalle, qui se termine par une nuit au poste de police. C’est en accompagnant leur pote Nathan dans un clandé qu’Abraham émet l’idée de braquer les clients de cette salle de jeu d’argent. Sans doute Nathan y avait-il déjà pensé, mais c’est Abraham qui est capable de réunir une petite bande. Avec Goran et Nathan, Trésor, un grand Black, et Karim pour s’occuper de la voiture, le braquage apparaît possible. Un peu de préparation et un bon repérage, l’affaire est lancée. Abraham a besoin d’amphètes, mais aucun de ses complices ne craque durant l’attaque du clandé. “Écoutez les mecs, vous avez voulu jouer les durs, vous allez me prendre un peu de pognon. Mais croyez-moi, je vais vous retrouver parce que Paris, pour les gars comme nous, c’est petit” leur promet-on. 8000 Euros chacun, joli pactole qu’il convient de ne pas trop exhiber. Larguant Julia, Abraham se rapproche d’un groupe d’étudiants du Quartier Latin. Il méprise Pierre et ses amis, mais ceux-ci deviennent rapidement de bons clients toxicos. Si la jeune Alexandra ne manque pas de charme, Abraham se doute qu’elle sera vite accro aux drogues. Les semaines ont passé. Nathan et Trésor sont partis claquer leur part sur la Côte d’Azur. Goran se montre maintenant inquiet. Il pense que Karim les a balancés à leurs victimes du clandé. Même si ça ne suffit pas, il est prudent pour le duo de changer de planque. La violence ne tarde pas à s’exprimer de plus en plus fortement pour Abraham et Goran… Utilisant un sujet qui a fait ses preuves, c’est un sympathique premier roman que produit ici Jérémie Guez. Petits truands combinards, braquage et partage du butin, un quotidien tout aussi médiocre par la suite, le risque impalpable en supplément. Des ingrédients solides du roman noir, correctement maîtrisés. Des personnages intemporels de la criminalité. Toutefois, on cherche vainement l’argument de LCI figurant en quatrième de couverture : “Avec des dialogues à la Audiard, des discours prenants et percutants.” Non, rien de vraiment neuf dans la narration, ni dans un dialogue tel que “Mais putain de merde, c’est un coup en or. On peut se faire un peu de blé sans risque, mec. C’est de l’argent sale, donc pas de police à l’arrivée.” On peut penser que ce jeune auteur trouvera probablement sa propre tonalité dans ses romans suivants, car on sent un potentiel. Ça reste un polar de bon niveau, plutôt agréable à lire.
Les avis, parfois dithyrambiques, concernant ce premier roman lus chez quelques amis blogueurs m’ont incité à acheter ce petit livre lors de sa réédition chez J’ai Lu. Mais je ne vous délivrerai mon verdict qu’après vous l’avoir présenté. Abraham, qui préfère qu’on l’appelle tout simplement Abe, vit avec son père, cohabite plutôt. Ses parents sont nés en Afrique du Nord, mais lui est venu au monde à Paris, après de longues années d’efforts de la part de ses géniteurs. Et comme cela avait marché une fois, pourquoi ne pas recommencer. Abe avait cinq ans quand sa mère a accouché d’une petite fille, mais les deux éléments féminins de la famille sont décédés. Son père se contente de regarder la télévision, quelques mots parfois à son fils, et c’est tout. Abe possède quelques amis qu’il a connu à l’école : Goran, Nathan, Trésor et Karim. Ils boivent des bières ou des boissons plus fortes, pas forcément toujours ensemble, et s’adonnent aux drogues, douces et dures. Et puis il y a Julia, étudiante à la Sorbonne, qu’il aime retrouver à la sortie des cours. Et plus si affinité, ce qui arrive souvent. Mais Abe ne se contente pas de se rendre dans le quartier de la Sorbonne pour rencontrer sa copine, il revend également de la drogue auprès d’étudiants qui ne demandent qu’à connaître le grand frisson. C’est alors que Goran et Abe, prenant un rafraichissement dans un bar, remarquent un curieux manège. Un client entre et au lieu de consommer se dirige vers le fond de l’établissement gardé par une espèce de garde du corps et entre dans une pièce marquée Privé. Il s’avère que dans cette arrière-salle quelques hommes se retrouvent régulièrement pour jouer au Poker. Et qui dit Poker dit mise en jeu et gains à la clé pour les petits débrouillards. Et les petits débrouillards, si c’étaient eux ? Aussitôt l’idée a germé dans la petite tête d’Abe, rafler l’argent et cela grâce aux copains. Il en parle à Goran et une expédition est envisagée. Juste quelques détails à régler, voler une voiture, se procurer des armes, des cagoules et le grand jour est arrivé. Enfin, le grand jour c’est excessif, c’est plutôt au petit matin qu’ils s’introduisent dans le bar et mènent à bien l’opération Pognon. Ils se montrent violents envers les joueurs, mais l’un d’eux leur promet des jours difficiles et des nuits d’insomnies. Et c’est bien ce qui se produit. La petite bande s’éparpille, Abe se fâche avec Julia pour ce qu’il considère comme une traitrise de la part de son amie, il déménage et plonge dans la drogue. Il déambule aussi dans Paris. Verdict, en mon âme et conscience, délivré dès les premières pages et même avant. Une petite rengaine me trottinait dans la tête. Il ne s’agissait pas d’une chanson mais d’un titre de livre : C’est beau une ville la nuit de Richard Bohringer, paru à la fin des années 1980 chez Denoël. Mais peu à peu, en tournant les pages, l’impression d’avoir déjà lu des dizaines de fois ce genre d’histoire était de plus en plus prégnante. De jeunes marlous organisant un braquage minable, et la drogue comme personnage principal, une descente aux enfers, l’alcool, autant de thèmes utilisés jusqu’à plus soif. On croit relire des romans écrits pas des auteurs comme Pierre Léon, Laurent Fétis, José-Louis Bocquet dans lesquels la drogue est presque comme un produit de consommation courante et obligée, objet d’une certaine complaisance. Nous sommes loin du Paris de Léo Malet ou surtout d’Auguste Lebreton, dont les petites frappes adolescentes sont des personnages principaux. Par exemple dans Les Hauts murs, La loi des rues ou Les jeunes voyous. Paris est à peine esquissé, des quartiers nommés par leurs stations de métro : Belleville, Barbès, Jules Joffrin, Château Rouge, Château d’eau, Charonne…. Par exemple, en face du square Jules Joffrin, pourquoi ne pas avoir décrit en une ou deux lignes l’imposante mairie du XVIIIème arrondissement, l’ambiance de Barbès ou de Château rouge avec son monde cosmopolite. Une carence de description, un décor effacé, un manque d’âme. Les personnages ne sont même pas tant soit peu sympathiques, et il est à noter qu’Abe alterne les périodes de toxicomane dépendant à celles de revendeur presque normal. Bref, un roman banal qui à aucun moment ne m’a ému ou fait vibrer. |
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