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PHILIPPE GEORGET |
Le Paradoxe Du Cerf-volantAux éditions JIGALVisitez leur site |
4241Lectures depuisLe lundi 28 Mars 2011
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Une lecture de |
Pierre Couture, 28 ans, boxeur professionnel. Barman à temps partiel pour vivre, les combats, même en championnat de France, ne rapportant pas lourd quand on est fidèle à l’entraineur et à la salle qui vous a fait grandir dans ce milieu. Pierre n’a plus de famille, disparue pendant son enfance. La douleur de cette perte n’est pas pour rien dans son besoin de cogner. Cogner sur la solitude, pour la remplir de ses deux poings de cuir, cogner aussi sur le système qui l’a doté d’un casier dès ses quinze ans pour avoir démoli un salopard de violeur dans un foyer d’accueil. Les bistrotiers, son entraineur, et un vieux chauffeur de taxi croate dont l’accent roule les « r »lui tiennent donc lieu d’attache affective. Pierre est dans la débine. Il ne gagne plus guère de match, se laisse aller à fumer, et à boire, de plus en plus. Ce n’est pas le meilleur moyen de garder la forme. Pour gagner un peu d’argent, il va accepter de jouer les gros bras dans un racket… Embarqué malgré lui dans une affaire qui trouve sa source dans les comptes mal réglés en Serbie par le TPI, tribunal pénal international, Pierre va revisiter ses vieux démons, courir, taper, noyer son désespoir, et gratter les mensonges qui font de sales croutes purulentes sur son âme. Sa course à la recherche d’abord d’un ami disparu, puis de mystérieux carnets porteurs de secrets sanglants, ne lui apportera qu’un surcroit de solitude et de désillusion. Pierre le poissard. Philippe Georget nous offre avec ce roman de genre une variation tout à la fois intelligente, forte et sensible sur les thèmes de la boxe, portée par une figure solitaire de hard boiled parisien. À la suite de son personnage, on va découvrir l’étrange confrérie des boxeurs, les odeurs de vestiaires, la griserie des projecteurs et la sauvagerie du ring. Son panorama de l’univers de ce sport, de sa grandeur et de ses misères, est riche et émouvant, même pour qui a « le noble art » en horreur. Il en tire une dimension épique qui doit tout à son talent. Malgré le thème du roman, qui recoupe les violences : celles de la guerre, celles de la boxe, il y a une grande humanité, une infinie tristesse, comme douce. Ce roman compte quelques-unes des plus belles pages du genre quand il raconte les combats, mais aussi la détresse du boxeur pris dans un maelstrom où s’agitent policiers, barbouzes, anciens tortionnaires et faux amis… La toile de fond historique recoupe celle des « Harmoniques » de Marcus Mate paru il y a quelques semaines. Cette guerre sale a laissé là-bas un sillage de haine, de rancune, de honte aussi, mais ici aussi. Avec un style tout à fait différent, sans doute moins flamboyant, Georget propose lui aussi un contrepoint musical : celui des chanteurs des jours heureux, quand le héros, petit enfant, écoutaient avec ses parents des artistes dont nous connaissons bien encore les paroles, nous lecteurs quadra et plus… Un beau roman, oui… à mettre sur le dessus des piles, tout à l’honneur des éditions Jigal. Philippe Georget a reçu le 27 mars le prix du meilleur premier roman de l’année 2010 au festival de Lens pour « La nuit tous les chats s’ennuient ».
Aux quatre coins du ring se dressent les adversaires, ceux qui avancent à visage découvert, ceux qui se dissimulent sous les traits du charme, la bonhomie de l’amitié et ceux qui se terrent au fond de l’oubli. Et lui se tient seul au milieu de cette arène où va se déchainer une violence jaillie des plaies mal cicatrisées de l’Europe du Sud-Est. Il y aura d’abord un match de boxe mal préparé, mais glorieusement perdu, puis des allusions à une retraite par KO. Il y aura ensuite le coup de poing dans une opération de racket peu glorieuse… et l’assassinat du commanditaire. À partir de cet instant, tout va s’accélérer pour Pierre Couture, 28 ans, barman à mi-temps et boxeur professionnel. La police ressort son casier judiciaire qui a perdu sa virginité alors qu’il n’avait que quinze ans. Son ami Sergueï, un chauffeur de taxi cinéphile, disparait en lui laissant pour seul présent un carnet vierge de tout contenu. Des agents serbes tentent de l’intercepter, une photo de son père décédé depuis toujours refait surface, un flic en profite pour lui proposer son aide, la jolie fliquette qu’il a rencontrée un soir de cuite, qu’il a copieusement insultée, mais qui court tous les matins en sa compagnie, se révèle lesbienne. Et si Pierre Couture n’était que le jouet d’un affrontement souterrain entre les rescapés du conflit yougoslave ? Et si les méchants n’étaient pas les Serbes comme nous l’expliquait un philosophe du manichéisme en chemise blanche ? Et si les Croates avaient une large part de responsabilité dans les crimes contre l’humanité commis au nom de la liberté ? Et si… mais cela fait beaucoup de si ! Et Philippe Georget avoue lui même que tous les personnages de ce roman sont imaginaires… à une exception : Ante Gotovina, général des armées croate existe réellement et il s’est rendu responsable d’actes inhumains lors de la contre-offensive lancée en été 1995 contre les séparatistes serbes de Krajina. Pour son précédent roman, « L’ETE TOUS LES CHATS S'ENNUIENT » Philippe Georget avait obtenu le « PRIX DU PREMIER ROMAN POLICIER 2011 », il vient de se voir décerner, toujours pour ce roman, le« PRIX SNCF DU POLAR 2011 ». Alors pour cette fulgurance, au prétexte d’un polar, dans l’océan du politiquement correct souhaitons lui d’obtenir le Prix du plus grand nombre de lecteurs.
Vingt-sept ans, toutes ses dents, mais les yeux tuméfiés, les muscles endoloris, le corps meurtri, Pierre Couture vient d’encaisser une flopée de coups et une nouvelle défaite. Un combat de boxe qui a tourné à son désavantage, une leçon donnée par un adversaire, plus jeune il est vrai, mais surtout mieux préparé. Pourtant Pierre lors de ses débuts pugilistiques était promis à un fort bel avenir, mais les aléas de la vie et du cœur en ont décidé autrement. Son amie, son amour, Sarah est partie, et Pierre est orphelin. Son père diplomate est décédé dans un accident et sa mère s’est suicidée peu après. Du moins c’est ce qu’il affirme, et il en est persuadé. Il a vécu dans des familles d’accueil. Arrivé aux portes de la gloire, il a négligé les entraînements et l’entretien de sa forme physique. Et ce soir-là Emile, son entraîneur, pense que Pierre vient de livrer son dernier combat. Il ne lui reste plus qu’un métier qu’il exerce à mi-temps, serveur dans le bar de Josy et René. Son ami Sergueï, plus âgé que Pierre, d’origine croate et chauffeur de taxi, lui propose un petit boulot dans ses cordes : devenir l’un des gros bras de Lazlo, lequel prête de l’argent, à un taux usuraire, à des personnes en difficultés passagères et qui oublient parfois de rembourser l’avance largement augmentée des intérêts. Il pratique également le racket. Accompagnant un dénommé La Fouine, Pierre se rend donc chez un certain monsieur Arnoult lequel rechigne à débourser, et ose même vouloir s’emparer d’une arme dans un tiroir. Mal lui en prend, Pierre plus vif se sert de ses deux mains, l’une pour asséner un coup de poing, l’autre pour subtiliser l’arme par le canon, et la donner à La Fouine qui la prend délicatement avec un mouchoir. Mais Pierre n’est pas satisfait de la tournure des événements, ce n’est pas un emploi pour lui, et il commence à faire la tournée des troquets. Il termine sa soirée sur un banc du parc des Buttes-Chaumont et se réveille pas très frais le lendemain matin. Deux inspecteurs de la Criminelle lui rendent une petite visite dans le café où il travaille, mais ce n’est pas pour consommer. Lazlo a été découvert assassiné, après avoir été torturé, et évidemment comme les empreintes de Pierre figurent sur l’arme du crime, il devient le principal suspect. Mis en garde à vue, notre boxeur barman nie l’évidence et affirme ne pas connaître Lazlo. De la fierté de sa part, car il regrette son acte chez Arnoult, mais aussi parce qu’il a, durant son adolescence, eu maille à partir avec la justice. Normalement ses incartades auraient dû être effacées de son casier judiciaire, seulement les services de police sont en possession de ses antécédents et surtout de ses empreintes. Ses souvenirs sont confus, malgré tout dans son cerveau embrouillé surgit une image. Il possède un alibi, tout ce qu’il y a de plus officiel. Durant l’heure présumée du meurtre il a arraché des mains d’une Pervenche, ex-Aubergine, son carnet à souches de procès-verbaux et l’a balancé dans le caniveau. D’ailleurs la policière reconnait cet incident et celui qui l’a provoqué. Les flics de la Criminelle ne peuvent qu’encaisser cet affront, mais en vérité ils se doutaient qu’ils faisaient fausse route et que la procédure n’avait pas été respectée. Remis en liberté, Pierre se rend compte qu’il est filé par deux individus qui pourraient être originaires d’ex-Yougoslavie. La Fouine est retrouvé égorgé et un commissaire, Cyril Lefèvre du service de coopération internationale, apprend à Pierre qu’il enquête à l’instigation de la police croate. Les deux individus louches, les Dupont-Dupond comme les a surnommés Pierre, sont dans le collimateur des services de police, mais plus surprenant, Lefèvre reprend l’enquête concernant la mort soi-disant accidentelle du père et de la jeune sœur de Pierre. Diplomate, en poste longtemps en Amérique latine, il avait terminé précocement sa carrière dans les Balkans en 1993. Et cette piste qui conduit aux pays éclatés de la Yougoslavie, les dissensions, et plus, entre la Croatie et la Serbie, touche apparemment de près Pierre, puisque son ami Sergueï a disparu dans la nature. Pierre Couture, après un mauvais passage à vide a décidé de reprendre la boxe avec sérieux, détermination et conscience, justement pour s’en redonner une bonne, d’autant qu’il retrouve la fliquette aux P.V., Julie, courant dans le parc des Buttes-Chaumont. Débute entre les deux jeunes gens un sentiment d’amitié, mais cela ne fait pas oublier à Pierre ses devoirs. Découvrir ce qui se cache dans ce sac de nœuds dans lequel son père semble impliqué, le meurtre de Lazlo et celui de La Fouine, la disparition de Lazlo, et autres événements et personnages, auxquels il doit faire face alors qu’il est complètement paumé dans cet imbroglio. Il doit penser au passé, mais également à son avenir pugilistique, un promoteur de combats de boxe ayant décidé d’organiser un combat entre lui et l’étoile montante de ce noble sport. Entre le passé et l’avenir s’immisce le quotidien, c’est-à-dire gérer ses relations avec Julie et échapper à des gros bras issus de la légion étrangère qui tourbillonnent autour de lui. Dans un panachage comprenant passé historique, action, émotion, humour sobre, plus quelques autres ingrédients utiles à la rédaction du roman passionnant en tout point, cette histoire se décline en trois rencontres de douze rounds chacun. Le personnage de Pierre Couture, essayant de surmonter ses problèmes familiaux, affectifs, professionnels, est attachant et le lecteur, s’il ne peut s’identifier à lui, vibre en même temps que lui au cours des différents obstacles qu’il doit surmonter. Et chantonner les chansons françaises que Pierre apprécie, un héritage parental, des interprètes comme Ferré, Lavilliers, Brel, Michel Berger, Piaf, et bien d’autres. Hors le contexte géopolitique, des exactions entre Serbes et Croates, des conflits interethniques, des rivalités religieuses, des ravages, des haines et des antagonismes de toutes sortes et de toutes origines qui forment la trame de l’histoire, la déchéance et la résurrection possible du boxeur entretiennent également le suspense et font penser à ces vieux films en noir et blanc qui mettaient en scène des boxeurs sur le déclin en proie à l’alcoolisme et aux mafieux. C’était beau, mais c’était triste ! Un boxeur pleurait dans ses gants. |
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