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DAVID GOODIS |
Cassidy's GirlAux éditions MOISSON ROUGEVisitez leur site |
2684Lectures depuisLe mardi 7 Juillet 2009
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Une lecture de |
En ce début des années 1950, Cassidy végète dans un quartier miteux de Philadelphie. Pourtant, il a connu des époques plus glorieuses dans sa vie. Sportif universitaire, puis héros de la 2e Guerre, il fut pilote de ligne. Jusqu’à ce qu’un accident d’avion dont il n’était pas responsable provoque sa déchéance. Après divers jobs, il est désormais chauffeur d’autocar. Il traîne surtout une réputation justifiée d’ivrogne. C’est chez Lundy, un bar accueillant une clientèle de purs alcooliques, que Cassidy passe son temps à s’enivrer avec ses amis. Quatre ans plus tôt, c’est dans ce même bistrot qu’il se laissa séduire par la sensuelle Mildred, devenue depuis sa femme. Cassidy est toujours accro à son excitante compagne, qui aime autant que lui les boissons fortes. Malgré l’obsession q’elle lui inspire, les scènes de ménages se succèdent. D’autant que Mildred aguiche Haney Kenrick, qui a plus de fric que Cassidy. Tout ça finit par une sévère bagarre entre les deux hommes chez Lundy, sans vainqueur. Cassidy devient l’amant de la jeune Doris, dont l’alcoolisme maladif lui donne envie de la protéger. Elle aussi a traversé de dures épreuves, qui l’ont fait sombrer. Cassidy décide que Doris et lui vont vivre ensemble, qu’il l’aidera à arrêter de se détruire. Ce qui rend plus que sceptique Shealy, un des amis de Cassidy. Sa violente rupture avec Mildred n’empêche pas Cassidy d’envisager l’avenir avec une certaine sérénité. Que sa femme ait vidé leur appartement et jeté tous ses vêtements le met quand même en rage. Peu après, il est agressé par trois hommes. C’est Kenrick qui les a payés pour le cogner. Cassidy se rend chez son rival, pour une mise au point, le laissant libre de vivre avec Mildred. Difficile pour Cassidy d’aider Doris, alors que son ami Shealy incite la jeune femme à s’alcooliser, mais il espère quand même y parvenir. Passager de l’autocar de Cassidy, Kenrick cause un dramatique accident. La police refusant de croire sa version, Cassidy s’enfuit et retourne se cacher à Philadelphie… David Goodis est un des auteurs de romans noirs que les éditeurs français s’efforcent depuis longtemps de sortir de l’oubli. Ils ont bien raison, c’est un écrivain de bonne qualité. Toutefois, comme le précise ici James Sallis dans la préface : “Rien ne prouve que Goodis ait eu de grandes ambitions artistiques ; il semble simplement avoir adopté un genre romanesque qui lui permit à la fois de gagner sa vie et de rester anonyme.” Ce roman où, pour les personnages “il n’y a pas d’échappatoire, seulement de nouveaux pièges fatidiques” (dit J.Sallis), est probablement le mieux structuré de l’auteur, qui déclinera dix fois le même thème ensuite. Goodis décrit des protagonistes de la fatalité et de la médiocrité, non sans savoir-faire : “Leurs corps, intoxiqués, affaiblis par l’alcool, n’étaient plus que des masses de substances animales, privées de pensées et d’émotions, qui avançaient, avançaient toujours dans cet espoir de survivre à cet horrible voyage qu’était la traversée de la rue.” Entre alcoolisme, serein espoir dans l’avenir, et fausse accusation, Cassidy subit les aléas d’un destin incertain et chaotique. A-t-on envie de s’apitoyer sur son sort, de lui souhaiter de s’en sortir ? Pas sûr, d’où l’ambiguïté des romans de Goodis – leur force, diront ses admirateurs. La part de dérision reste rare dans le récit : “Tu n’es pas le seul, dit Shealy. On aime tous ça, nous les paumés, les épaves. On en arrive tous à prendre du plaisir quand on descend la pente, pour arriver en bas, au fond, là où c’est doux, dans la boue.” Néanmoins, “Cassidy’s girl” est un bon exemple du roman noir traditionnel, à lire pour enrichir sa culture polar. |