“Fond de cale” de Caryl Férey. Marie, 19 ans, déjà écœurée de la vie, est de retour à Brest. Elle veut retrouver Pierrot, son premier amour, artiste peintre pratiquant des collages. Elle contacte un docker surnommé Le Cinglé, qui n’en sait guère plus. C’est au bistrot d’Alain, vieux copain de Pierrot, que Marie apprend qu’il a squatté durant deux mois l’ancienne prison de Pontaniou. Elle s’y installe, s’isole pour restaurer les lambeaux des collages de Pierrot, pensant y trouver un signe de lui. Elle recueille et soigne Gérard, la mouette blessée. Oiseau fragile, elle aussi, Marie sait qu’elle n’a rien à espérer dans un monde sans pitié. Couleur noir désespoir pour cette nouvelle, qui fut publiée dans le recueil collectif “Brest, l’ancre noire” (Éd.Autrement, 2003). “L’âge de pierre” de Caryl Férey. Pendant leur enfance, tout oppose les deux frères. Le cadet qui tarde à grandir, on le prend pour un petit efféminé. L’autre, l’aîné, il est tout en muscles. Sportif viril, il a pratiqué le judo, puis le foot et le tennis. C’est un compétiteur brutal, hermétique à la finesse. Malgré ses aptitudes, il rate ses penalties et manque de revers. Violent dans la défaite, il attribue ses échecs à la malchance. L’aîné fait à son jeune frère une réputation de pédé qui mérite sa branlée. Il est vrai que les amis du petit sont ambigus, un peu trop tendres entre eux. On peut avoir des traits féminins, être entouré de tantouzes, tout en étant attiré par les filles. Le genre de subtilité qui échappe au sportif borné. L’aîné est nul à l’école. Colérique, il fait voler livres et cahiers. Quand ils jouent ensemble, il impose ses propres règles. Si un jeu réclame du raisonnement, il invoque encore injustice et manque de bol. Les centres d’intérêt de son frère trop sensible, il s’en moque. Mais le cadet est un rusé renard qui sait se faire câliner par les filles… La virilité face à la sensibilité, le muscle contre l’esprit, voilà un problème que beaucoup ont dû affronter durant l’enfance. Le portrait du grand frère, stupide et tyrannique, champion sans cerveau, est un pur régal. Victime désignée, le petit narrateur se montre le plus futé. On est vite séduit par cette histoire ironique, vive et juste, qui fut publiée dans la collection La maîtresse en maillot de bain (2006). “La décalcomanie” de Sophie Couronne. La jeune Zita sait qu’elle est, comme sa jeune sœur, un enfant non désiré. De ce fait, les relations avec sa mère ont toujours été fausses. Son père étant militaire, Zita loge d’une caserne à une autre. “La caserne c’est une sorte de bulle étanche, loin de la vie civile, laquelle n’est peuplée que de dangers, d’irresponsables et de gauchistes.” Malgré l’esprit rigoureux, il y a là autant d’ados à problèmes qu’ailleurs. Très tôt, Zita a été déclarée surdouée. Elle est devenue une grande lectrice, s’intéressant à une large diversité de sujets. Zita supporte mal sa couleur de cheveux. “Parce que je suis rouquine, en plus d’avoir des hormones en état de marche beaucoup trop tôt, et des petites cellules grises qui carburent beaucoup trop vite pour mon âge. Je les accumule, c’est sûr. Je suis une chierie.” Zita déteste la couleur beige, et le catéchisme, la religion en général. Sans doute parce qu’elle a eu des grands-parents bourgeois, pieux à l’excès. Tout ça l’a rendue dépressive… “Djeddah” de Sophie Couronne. Adulte, Zita exerce le métier d’ingénieur du son. Un peu larguée côté cœur, elle accepte un job particulier, une fête pour le mariage d’un prince, fils du boss de la plus grande banque d’Arabie Saoudite. Zita remarque qu’on ne lui demande aucune formalité avant de prendre l’avion. Quatre autre techniciennes ont été engagées, ses compagnes de voyage. Avec leur accompagnateur, Farid, les cinq jeunes femmes doivent faire une étrange escale à Vienne. Le consul leur envoie sa Rolls et les invite chez lui. Ivre ce soir-là, il ne devrait pas les confondre avec un harem. Malgré les hésitations des filles, le périple vers Djeddah se poursuit. Bonnes surprises ou grands risques pour Zita, le voyage devient une épopée aventureuse… On ne sait si les deux nouvelles de Sophie Couronne comportent une part autobiographique, mais elles sont savoureuses. Sa narration enjouée les rend très vivantes et crédibles. Un talent à découvrir !
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