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BEATRICE EGEMAR |
Le Printemps Des Enfants PerdusAux éditions PRESSES DE LA CITEVisitez leur site |
948Lectures depuisLe mercredi 30 Octobre 2013
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Une lecture de |
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Les événements qui se sont déroulés en l'année 1720 est encore présente dans les mémoires des Parisiens et il semblerait bien que de nouveau les mêmes faits se reproduisent trente ans après. Si en 1720 c'étaient des femmes du monde (prostituées) et des vauriens qui étaient enlevés pour être déportés en Mississipi, plus connu de nos jours sous le nom de Louisiane, ce nouvel épisode de disparitions inquiétantes se concentre sur celui de jeunes enfants. Les rumeurs courent, comme toujours, sans véritable fondement, arguant qu'un ladre (lépreux) serait à l'origine de ces enlèvements afin de guérir grâce à des bains de sang pur. Et nul n'est plus pur que des gamins. Il en est même qui insinuent qu'à la cour, un personnage important du royaume en serait à l'origine... Dans la famille Dupré, on est parfumeur de père en fils, et même fille, depuis trois générations. Marie-Anne, la plus jeune, n'a que dix-neuf ans mais cela fait déjà sept ans qu'elle travaille dans l'échoppe familiale après avoir quitté l'école. Manon, puisqu'elle a ainsi été surnommée, est peut-être la plus douée. Le créateur, Joseph Tombarelli, était originaire de Grasse, la ville des parfums et des senteurs. Puis son gendre Jérôme lui avait succédé mais depuis sa mort un an auparavant, c'est Madeleine son épouse, Claude, le fils, et Manon qui tiennent la boutique, s'affairant aux préparations de parfums, d'onguents, de poudres et de crèmes, à la vente et à la livraison, aidés par leur jeune apprenti Gaspard. En ce vendredi 10 avril 1750, Catherine, l'aînée mariée à un chirurgien, entre dans la boutique, quelque peu affolée. Elle vient de récupérer son fils Jean-Baptiste, un peu simplet, qu'elle avait confié à sa belle-sœur en Normandie, mais celle-ci malade ne peut plus s'en occuper. Barbe, la cuisinière, arrive précipitamment expliquant qu'un gamin vient d'être enlevé, un de plus, et d'autres étant déjà enfermés dans un carrosse gardé par des exempts. Quelques jours plus tard, Jean-Baptiste disparait. Violette, une amie d'enfance de Manon, légèrement plus âgée que la jeune fille vient lui présenter son nouvel amoureux, Joseph Vérité, appartenant au régiment des Gardes-françaises. Au premier abord celui-ci déplait quelque peu à Manon qui le trouve prétentieux. Mais elle change vite d'opinion, non pas parce que Violette est actrice et cueilleuse d'hommes, mais parce que Joseph se montre courageux. Notamment lorsque, à la recherche de Jean-Baptiste il intervient lorsqu'un gamin parvient à échapper aux exempts, se dressant devant les policiers et aidant les autres gamins retenus dans un carrosse à s'échapper. Manon aperçoit une boiteuse accompagnée d'un gamin fuyant l'agitation provoquée par cette échauffourée. Tout le monde s'active pour retrouver le gamin. Manon a une idée et elle dépêche Gaspard chez son beau-frère afin de lui porter un message. Gaspard veut lui dire quelque chose, mais Manon diffère les révélations que le jeune apprenti veut lui confier. Posture dont elle se mordra les doigts plus tard. Car si le jeune Jean-Baptiste est retrouvé au bout de quelques jours, il s'était perdu en voulant se rendre à la boutique Au bouquet de Senteurs attiré par les fragrances qui émanent des sacs, des pots et autres récipients, c'est au tour de Gaspard de disparaître.
Cette affaire concernant les disparitions en plein Paris de jeunes enfants, miséreux ou non, pour des motivations diverses, est un des nombreux épisodes troubles qui secouèrent la capitale et que les manuels de l'histoire de France ignorent. Or la foule qui se révolte contre l'attitude des exempts reflète l'acrimonie qu'elle voue à ces policiers qui exécutent certains ordres venus de leur hiérarchie. Et il ne faut pas s'étonner que quarante ans plus tard les Parisiens seront à la pointe de la Révolution. L'antagonisme entre exempts et Gardes-françaises perdure un peu comme cet antagonisme larvé entre policiers et gendarmes que nous connaissons aujourd'hui. Mais le propos principal de l'auteure est bien de mettre en avant l'esprit licencieux dont font preuve certains personnages hauts placés, pensant que leur rang permet d'assouvir leurs besoins en toute impunité. La dégradation d'une époque est remarquablement décrite et tout ne baigne pas dans la fange. Grâce à Manon, et à ses préparations esthétiques destinées à soulager les petites gens comme les nobles, dont Marie-Jeanne Poisson plus connue sous le nom de la Pompadour, une certaine fraîcheur plane sur ce roman. C'était le temps où les décoctions, pommades, onguents et autres produits de beauté ou médicinaux étaient préparés à base de substances simples, recherchées, rares même, d'origine minérale, végétale ou même animal dont le fameux sperme de baleine qui n'est autre qu'une substance blanchâtre qui réside dans le cerveau de certains cétacés, mais sans adjonction de produits chimiques. Comme dans la plupart des romans historiques la majorité des protagonistes évoluant dans ce récit ont réellement existé ce qui donne une authenticité à ce roman dont certains des épisodes ont malheureusement existé. Brigitte Egemar dont ce n'est pas le premier ouvrage publié, puisqu'elle a écrit une vingtaine d'ouvrages pour les enfants et adolescents chez Fleurus, Gulf Stream ou Galapagos, propose une histoire émouvante qui peut convenir aux adolescents mais dont tout amoureux de la grande Histoire se régalera. Je reprocherai seulement un tout petit défaut, l'emploi abusif du mot Joli dans les premières pages. |
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