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MICHEL EMBARECK |
La Mort Fait MalAux éditions ARCHIPOCHEVisitez leur site |
2310Lectures depuisLe samedi 7 Septembre 2013
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Une lecture de |
Moizy-les-Beauges apparaît une ville en plein essor en cette toute fin de la décennie 1990. Christophe Gros-Piron, le maire actuel, est proche des milieux d'affaires. Il a la confiance des notables francs-maçons locaux. Son prédécesseur, Vuillermoz, communiste pur jus exilé en Belgique, croit encore à un possible retour gagnant dans sa ville. Par tradition, on évite ici tout ce qui bouscule le quotidien, principe auquel se tient encore Gros-Piron. À la veille des fêtes de fin d'année, on déplore l'incendie qui détruit intégralement les Grandes Galeries, institution commerciale de Moisy. La journaliste Juliette Baumann va couvrir ce regrettable événement, faits divers parmi d'autres. Instituteur retraité, son père Max flaire une affaire pas nette, car il connaît bien la bourgeoisie de cette ville. Victor Boudreaux est un homme mûr, mesurant environ deux mètres, pesant son quintal. Sa vie a été émaillée de sombres épisodes, tant en Asie qu'aux États-Unis. Voilà près de douze ans qu'il est détective privé en France. Assisté par la sensuelle et cinéphile Jeanne, il s'occupe pour l'essentiel de fraudes, évitant désormais les missions sur le terrain. On le dit migraineux et psychopathe, sans pitié avec ses ennemis. “Au sens clinique du terme, Boudreaux se considérait comme le premier et le dernier privé psychopathe en activité.” Victor est contacté par le directeur d'une société d'assurances, afin d'enquêter sur les circonstances de l'incendie des Grandes Galeries. Le détective refuserait, s'il ne s'agissait de Moisy-les-Beauges. Il y a vécu autrefois, en gardant un souvenir plutôt mitigé. Victor se munit d'un équipement particulier, avant d'explorer clandestinement le magasin sinistré. Pas de trace d'un court-circuit. Quelques prélèvements sur les lieux. Victor n'est pas seul à visiter l'endroit, deux inconnus faisant de même. Peu après, il contacte Juliette Baumann. La journaliste ne cache pas son scepticisme quant à un incendie criminel. Ne disposant que de trop peu d'éléments, Victor retourne à ses dossiers courants. Le père de Juliette lui apprend par téléphone que sa fille a été sérieusement blessée, victime d'un duo jouant avec du 9mm. C'est copieusement armé que le détective reprend la direction de Moisy. Selon Juliette, hospitalisée, les tireurs portaient des chaussures de boxe. Comme les deux inconnus du commerce sinistré, note Victor. L'ex-maire Vuillermoz ne risque plus de reconquérir sa ville, exécuté qu'il est par la même paire de sbires. S'il ignore encore ce crime, Victor baptise vite les tueurs Branli et Branlo. Max Baumann est sans complaisance pour les notables d'ici, nouveaux riches qui “en quinze ans, sont passés du patrimoine familial à l'impôt sur la fortune”. On peut penser qu'avant l'incendie, une opération financière et immobilière était déjà en cours autour des Grandes Galeries. D'ailleurs, la principale propriétaire des murs n'est pas en mesure de gérer quoi que ce soit. Pour Victor, il va donc être indispensable d'utiliser la manière forte pour démasquer les vitrines légales, pour avancer vers la vérité... Excellente idée de rééditer ce roman paru en 2000 dans la Série Noire. Avec “Le rosaire de la douleur”, il s'agissait des premières aventures de Victor Boudreaux. On le retrouve dans une autre enquête, “Avis d'obsèques”, titre nouveau publié en cette rentrée 2013. Sans doute la première belle qualité de “La mort fait mal” tient-elle dans la virtuosité narrative typique de cet auteur. Le héros est un fonceur, pas du genre à se laisser impressionner par ces magouilleurs de tous poils qui se disent investisseurs, fussent-ils Hongrois ou Français. Ni par des experts de la gâchette, lui-même étant expérimenté en maniement des armes, et situations à hauts risques. Si l'on nous décrit des décors jurassiens ou bressans, c'est l'action qui prime dans ce scénario. Embareck connaît ses classiques du roman noir, Hammett, Chandler and Co, mais il sait donner une tonalité toute personnelle à son histoire. Soigner le langage, peaufiner l'écriture, sans affaiblir le rythme, c'est le moyen d'offrir une véritable force au récit (“L'incompréhension envahit le visage de la veuve comme si, d'un coup, on lui arrachait à vif sa perfusion d'espoir.”). Bonne occasion de (re)découvrir le talent de Michel Embareck. |
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