Franck Parrish est un fléau. Un flic dont la hiérarchie ne sait plus quoi faire tant son alcoolisme suicidaire, son manque de respect des procédures et de la hiérarchie posent problème.Résolument immergé dans son vague à l’âme, Parish a perdu récemment son coéquipier. Bonne raison, ou très mauvaise, pour passer ses rares heures de loisir à picoler et à s’engueuler avec sa famille. Ex-époux défaillant, père calamiteux… Ses chefs lui imposent de rencontrer tous les jours une psy, qui, de vous à moi, à un sacré mérite de supporter sa tête de mule.Le plus gros problème, pour lui, réside dans ses origines. Son père est une légende vivante, un héros tué en service, l’homme le plus couvert de distinctions de toute la police New Yorkaise, un as de la lutte antimafia. Un de ceux appelés « Anges » tant ils se confondaient avec la mission de protection de leurs concitoyens. Mais, aux yeux de son fils, une ordure, un pourri, un salaud. Janus aux deux visages, Parish père était le jouet de la mafia, un complice sordide n’ayant jamais arrêté que des petites pointures désignées comme bouc émissaire, protégeant tous les trafics, en particulier sur l’aéroport JFK.Au début du roman, il échoit à Franck Parrish à la fois un nouvel équipier et une affaire de meurtre. Bien décidé à prouver à tous, sans doute à lui le premier, qu’il reste un flic hors norme, celui que son père aurait dû être, Parrish va s’acharner et tenter de mettre la main sur un pervers de la pire espèce. Rapidement, il fait des liens : le tueur utilise les fichiers de l’aide à l’enfance pour y trouver des proies faciles, ex fugueuses fragiles, ou gamines perturbées.Le roman est rythmé par les séances de Franck avec la psy. On finit par avoir une vue d’ensemble du personnage, mais pas avant d’avoir suivi avec lui la thérapie imposée. Le passé s’avère plus compliqué, le présent peut-être plus simple. Les portraits sont particulièrement touchants. La fragilité de Parrish, son tissu familial, ses rencontres, ont quelque chose de terriblement humain : imparfait et douloureux…On a ici un excellent roman qui raconte plus que l’affaire concernée. Le suspens, la construction, rien à redire, et si Ellory, qui nous avait habitués à des fresques dépeignant une vie entière avec Anonymus ou Vendetta , concentre ici son roman sur une seule enquête, celle-ci englobe deux générations, et tout un pan du passé des Etats Unis.Il y a une similitude troublante, de mon point de vue, entre Franck Parrish et Harry Bosch, le héros récurrent de Mickaël Connelly. Pour l’un comme pour l’autre, la problématique filiale est prégnante, le doute quant à la place d’un flic dans la société, la solitude...On pourrait calquer ce schéma aussi bien sur l’un que sur l’autre de ces héros. Il y a pire que d’être comparé à Connelly, et j’espère qu’Ellory me le pardonnera. La vision qu’il donne de Manhattan vaut bien celle de L.A que nous offre son confrère en écriture.L’épaisseur humaine de ses personnages, la trame riche, le suspens… Si Ellory adopte un nouveau point de vue d’écriture, c’est avec un talent renouvelé tel qu’on ne regrette rien de ce tournant.
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