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SERGUEI DOUNOVETZ |
Les Gens Sérieux Ne Se Marient Pas à VegasAux éditions FRENCH PULPVisitez leur site |
1921Lectures depuisLe samedi 17 Mars 2018
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Une lecture de |
Années 70. A la mort par overdose de Patchwork, leader de son groupe de Rock'roll, Abel réalise qu'il ne deviendra jamais une légende du genre… Alors, il quitte son bled perdu du Texas… 25 ans plus tard, il est de retour, dans l’intention d’y organiser un concert événement mondial. Voilà présenté en quelques mots la trame sensée de ce roman signé de l’ex-chanteur-compositeur du groupe Les Maitres Nageur. Trame sensée, parce qu’il y a l’autre, l’insensée, l’absurde, la délirante... aux cuts francs et au montage haché. Abel quitte son bled perdu du Texas… à bord du corbillard qu’il vient de voler avec à l’arrière le cercueil où git le cadavre de Patchwork… Pourquoi a-t-il dérobé ce cadavre ? Pour l’interroger ! Pour savoir pourquoi il a fait ça, pourquoi il est mort, pourquoi il a anéanti ses espoirs de devenir une star du rock and roll ? Sur ses entrefaites, débarque, à cheval sur une antique Harley-Davidson 1947, Candie, une fille en Doc Martin’s… Et l’imbroglio surréaliste s’amplifie : le cercueil glisse dans l’eau de la rivière au bord de laquelle Abel a conduit le corbillard… et Candie veut le récupérer afin de faire une photo… et le cadavre disparait… et Candie et Abel… posent de part et d’autre du cercueil vide… et Candie écope d’une balle entre les seins et choit dans la rivière qui emporte son corps… et pendant ce temps, au saloon, Fornica abattait Coyote… le KKK balancé une charge de dynamite et Jess Tardy le magnat du coin, se réjouit et demande à sa « compagne » de ne pas s’exhiber nue au balcon… Après cette entrée en matière totalement foutraque et sous acide, lorsque le lecteur tourne la page et lit « Un quart de siècle plus tard », il se doute que le temps ne fait rien à l'affaire Serguei Dounovetz, auteur polymorphe, convie le lecteur à une folle odyssée au royaume de la démesure foutraque : le shérif du coin, un psychopathe notoire tente de violer une inconnue croisée sur la route poussiéreuse ; elle le tue. Un indien recueille la jeune femme qui s’est perdue dans le désert ; les onguents qu’il lui applique sont des plus discutables. Les vampires se mêlent à l’affaire, les colts chantent la mort, une diseuse de bonne aventure croise les pornographes et autre magnat de la presse… et Abel prépare le concert du siècle, celui d’un groupe rock qui n’a jamais existé.
« Les gens sérieux ne se marient pas à Vegas » : objet littéraire non identifiable, baroque jouissif et addictif ; à lire de toute urgence !
Collection Polar. Parution 15 mars 2018. 304 pages. 8,50€. Les gens sérieux se marient-ils, d’ailleurs ? Musicien sans grand avenir, Abel vient de refermer deux cercueils. Le premier, c’est l’étui de sa guitare, une Fender Mustang. Il a décidé d’arrêter la musique, conscient de son manque de talent. L’autre, c’est celui de son frère Patchwork qui vient de décéder d’une overdose. Une piqûre de trop dans la veine, pas de veine, son cœur ne l’a pas supporté. Abel était chanteur et guitariste avec son frère, dans le groupe des Maîtres nageurs, qui avaient obtenu quelques retombées médiatiques. Mais comme son frère est mort, coulés les Maître nageurs. Abel s’enfuit avec le corbillard contenant le cercueil de son frère et le voilà parti sur les routes désertiques du Texas. Mais comme en court de route il s’octroie quelques doses de produit illicite, il dérape et le véhicule se retrouve au fossé. Désertique ? Pas tout à fait. Un scooter arrive chevauché par une magnifique jeune fille. Il ne s’agit ni plus ni moins que de Candie, son amour de jeunesse. Ils avaient batifolé ensemble lorsqu’ils n’avaient que quatorze ans environ, mais les aléas de la vie les ont séparés. Depuis, Candie est devenue photographe, et elle a une idée magnifique, prendre en photo le corbillard et le cercueil de Patchwork et eux-mêmes. Seulement le cercueil dégringole dans la rivière proche et impossible de retrouver le corps qui est parti à vau-l’eau. Pendant ce temps à Justiceburg, quelque part entre Lubbock, Abilene et Odessa, au Cactus rose, un bar tenu par Coyote, un vieux Chicano mi-mexicain mi-cheyenne, un jeune soiffard asticote le propriétaire. Formica serait le fruit des amours entre Coyote et sa mère. Une rumeur peut-être, mais entre les deux hommes, ne règne pas l’entente cordiale. Une altercation se produit devant les poivrots qui ne demandent qu’à assister au spectacle gratuit, et Formica de sang froid abat Coyote. Légitime défense, ou démence, comme on veut. Même le sheriff marshal Andrew Maxel Broodecker se contente au début d’infliger des amendes aux contrevenants, puis il se désintéresse de la question car autre chose le préoccupe. De l’autre côté de la rue, Jess Tardy, propriétaire d’une concession pétrolifère et producteur d’émissions de divertissement sur une chaîne de télévision locale, surveille le chambard au Cactus rose. Sa copine, peu gênée, se montre nue au balcon, ce qui évidement attire les regards des consommateurs. L’un d’eux est particulièrement intéressé et Tardy n’hésite pas à lui offrir quelques pruneaux sortis de son arme à feu, histoire de calmer ses ardeurs. Exit le voyeur, et un contrat de rempli, un pacte ayant été passé entre Tardy et le sheriff marshal. Revenons à Abel, qui aurait pu se prendre pour Caïn, puisqu’il avait cru voir les yeux de son frère dans sa tombe, enfin pas encore, dans son cercueil, Abel assiste impuissant au meurtre de Candie, meurtre perpétré par un motard qui ne laisse pas son nom.
Vingt-cinq ans ont passé depuis ces événements et l’on retrouve les principaux protagonistes de cette histoire qui ont bien changé. Par exemple Formica est devenu un pirate informatique et joueur de poker tandis qu’Abel s’est institué manager musical. Il écrit des articles dans des magazines et dirige de petits groupes sans grande envergure dont les Exotic Lizard, un groupe fantôme composé cinq femmes genre bombes sexuelles. Ils se sont donné rendez-vous au Cactus mauve, nouvelle appellation du Cactus rose, bar racheté depuis la mort du Chicano par Jess Tardy. L’homme, qui grenouille toujours autant, partage sa vie entre Justiceburg et la Californie, entre Claire, la mère, et Kacy, la fille. Il ne faut pas oublier Ours vigilant, un indien qui a soigné une quinquagénaire photographe retrouvée mal en point, le Sheriff-adjoint Booble qui voudrait bien devenir sheriff à la place du sheriff, Tante Kromeski, une vieille tireuse de carte renommée dans la région, un médecin légiste, normal il s’agit quand d’un roman policier, des chasseurs de prime, des fascistes, et autres vrais faux imbéciles, dont on ne sait s’ils jouent la comédie ou s’ils sont vraiment en déficit de neurones. A moins que les différentes drogues ingurgitées, poussées dans l’estomac grâce aux boissons éthyliques, et des calumets de la paix au fourneau empli d’herbes qui ne proviennent pas de la Provence, influent sur leur système.
Certains d’entre eux connaîtront un destin tragique, car n’oublions pas, nous sommes au Texas, et les revolvers remplacent, avantageusement ou non, les guitares. C’est une autre musique, pas toujours harmonieuse, mais qui a l’avantage de faire du bruit et de réveiller les consciences. Et comme la frontière avec l’Oklahoma est proche, une petite chanson s’infiltre insidieusement dans notre tête. Souvenez-vous : Dans la vallée de l'Oklahoma Ton coup de fusil fait mouche toutes les fois Mais attention un jour tu finiras Dans la poussière les bras en croix… Dans une atmosphère digne des grands auteurs de romans noirs américains, jouant sur l’ironie, voire le sarcasme, Sergueï Dounovetz nous propose de revisiter le Texas, à la manière décalée de Jim Thompson dans 1275 âmes, et de Charles Williams avec Fantasia chez les ploucs et Aux urnes, les ploucs ! Toutefois, si l’ambiance est quelque peu semblable et si les personnages sont tout autant décalés, le sujet est traité d’une manière parfois surréaliste, aussi bien dans les dialogues que dans les situations. Et comme nous avons à faire à de Petits blancs du Texas, vous comprendrez aisément qu’ils n’usent pas d’un langage châtié mais s’expriment souvent en référence à des résidus intestinaux. Et pour corser le tout une petite atmosphère de fantastique plane sur ce roman onirique, surtout dans l’épilogue. Et comme Sergueï Dounovetz est joueur, il s’amuse à placer ici ou là quelques références le concernant. Les retrouverez-vous ?
C’est le job de tante Kromeski de deviner. Elle lit l’avenir dans les entrailles des mocassins et des rats musqués, les boules de pétanque, le café turc et les pots de yaourt périmés. Sa réputation dépasse les frontières du Texas. Ses clients viennent du Nouveau-Mexique, de l’Arkansas et même de Louisiane pour la consulter. Et tu crois que cette femme, à qui rien n’échappe, ne va pas deviner que tu ne portes pas de slip ? !
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