C’est un héros que l’on aime, l’éternel Arsène Lupin, archétype du personnage de gentleman cambrioleur. Il fut créé en 1905 par Maurice Leblanc pour le journal Je sais tout, dans “L'Arrestation d'Arsène Lupin”, bientôt suivi d’autres nouvelles qui seront publiées en volume et connaîtront un grand succès. Jusqu'à la fin des années 1930, on retrouvera ce héros dans “813”, “Arsène Lupin contre Herlock Sholmès”, “L’aiguille creuse”, “La comtesse de Cagliostro”, “Le bouchon de cristal”, “Les huit coups de l’horloge” et bien d’autres titres passionnants. Bon nombre d’études ont été consacrées à Arsène Lupin, toutes très documentées sur l’univers de ce personnage aussi marquant que le commissaire Maigret, Sherlock Holmes, ou Hercule Poirot. Pour le soixante-dixième anniversaire de la mort de Maurice Leblanc, Philippe de Côme rend hommage à ce sympathique héros de la littérature populaire, dans “Arsène Lupin de A à Z”. Il nous rappelle d’abord les origines familiales et les influences de Maurice Leblanc. Puis vient une chronologie de la vie d’Arsène Lupin. On souligne ensuite que l’art du déguisement et l’utilisation de multiples pseudonymes furent les grandes spécialités de celui qui cambriolait sans violence. Après avoir détaillé ses noms d’emprunt, c’est avec autant de précisions la liste des femmes qu’il croise dans ses aventures qu’on nous propose. Les affaires dont Arsène Lupin est le héros sont également liées aux lieux, et à leur contexte. C’est ainsi qu’est dressée la liste des rues de Paris où le gentleman cambrioleur a habité et œuvré. Plus loin, on trouvera les villes de la saga lupinienne, d’Étretat à Baden-Baden, de Chartres à l’abbaye de Valmont. D’autres auteurs sont recensés, qui ont également créé des personnages de gentlemen cambrioleurs : Lawrence Block, John Creasey, E.W.Hornung, Edgar Wallace, etc. Il était évident qu’Arsène Lupin deviendrait rapidement aussi un héros de cinéma. D’ailleurs, la première adaptation américaine date de 1908. Suivront des films français, américains, anglais, et même un film mexicain en 1947 et plusieurs adaptations japonaises. La dernière version française date de 2004, film d’Édouard Molinaro avec Romain Duris et la splendide Kristin Scott Thomas. À partir de 1971, c’est la télévision qui va relancer la popularité d’Arsène Lupin. Tous les épisodes sont recensées, avec moult détails sur le synopsis et les personnages, ainsi que d’insolites anecdotes. Si Georges Descrières s’était approprié l’identité d’Arsène Lupin, ce rôle fut aussi tenu avec autant de talent par François Dunoyer et Jean-Claude Brialy. On pourrait regretter que l’auteur oublie les nouvelles aventures d’Arsène Lupin écrites par Boileau-Narcejac dans les années 1970; et discuter de la disposition de certains chapitres. Peu importe, voilà une nouvelle étude très intéressante, permettant une approche de bon aloi. Les générations de lecteurs passent, mais ce diable d’Arsène Lupin reste immortel et fascinant pour tous.
Une autre lecture duArsène Lupin De A à Zde PAUL MAUGENDRE |
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Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Arsène Lupin sans jamais oser le demander, Philippe de Côme vous l’offre, ou presque. Décliné en trois parties et douze chapitres, cet ouvrage est une étude sur un personnage de malandrin sympathique, sans oublier son créateur, Maurice Leblanc. Arsène Lupin, quoique certains s’en défendent, reste l’un des personnages majeurs de la littérature d’évasion, de la littérature policière, mais qui se positionne de l’autre bord de la barricade, en se plaçant au côté des mauvais garçons pour lesquels le lecteur ne peut ressentir que de l’empathie. Alors que la littérature de détection est encore en phase de recherches et débute son émancipation, le personnage de Gentleman-cambrioleur non violent et respectueux des femmes, qui défie les policiers avec humour, ruse et malice, ne peut qu’accrocher le lecteur et tisser des liens avec celui-ci. Robin des Bois n’est pas loin, et dépouiller le méchant riche au profit de la veuve et l’orphelin est une pratique qui génère la sympathie et la connivence. Et puis Arsène Lupin possède le charme du prestidigitateur, de l’acteur de théâtre, qui se fond dans le décor grâce à sa faculté de déguisement, de changement de physique et d’identité. Quarante sept identités sont recensées, dont certaines sont sensiblement approchantes, mais qui bernent à chaque fois les policiers, le policier Ganimard en tête. Respectueux des femmes, c’est vrai, mais il est aussi et surtout un redoutable séducteur, et la vingtaine de personnages féminins qui gravitent tout au long des romans et nouvelles qui lui sont consacrés sont répertoriées. La comtesse de Cagliostro en bonne position, évidement. Philippe de Côme recense également les principales villes qui vont connaître les exploits d’Arsène Lupin, et le département de la Seine-Maritime est largement représenté, avec Dieppe, Etretat, Fécamp mais aussi de petits bourgs moins connus mais au charme indéniable : Caudebec en Caux, Doudeville, Duclair, Gueures, Jet les abbayes de Jumièges ou Saint-Wandrille… Et si Lupin change souvent d’identité, il déménage souvent également et nombreuses sont ses adresses parisiennes. Afin de donner plus de crédibilité au personnage, il faut le placer dans son temps et faire évoluer des personnages de l’époque devenus célèbres mais dont le patronyme est parfois déformé, comme Lyautey devenu Lauty dans Les dents du tigre. Très tôt le cinéma s’est emparé d’Arsène Lupin et il est à noter que les films étrangers sont plus représentatifs en nombre que les films français. Et si Jean-Claude Brialy ou Romain Duris ont prêté leur visage au Gentleman cambrioleur, restent dans les mémoires, du moins dans la mienne, les prestations de Robert Lamoureux, peut-être à cause de sa gouaille et de sa voix. Quant aux adaptations télévisées, qui forment la troisième partie de l’ouvrage et se révèle la plus conséquente avec fiches techniques, synopsis, personnages et insolites, elles ont été nombreuses, principalement deux séries qui auront marqué l’âge d’or de la production française et dont les interprètes furent François Dunoyer à la fin des années 1980, mais surtout Georges Descrières au début des années 1970. Des téléfilms qui auront eu pour support musical la fameuse chanson interprétée par Jacques Dutronc, et qui incitait toute la famille à s’installer devant le petit écran. Un ouvrage sérieux, dont les textes sont attirants et donnent envie de relire les Aventures d’Arsène Lupin, mais auquel je reproche quelques omissions. Par exemple si l’auteur se réfère au Dictionnaire Arsène Lupin de Jacques Derouart, il omet de préciser que cet ouvrage fut édité chez Encrage en 2001. Philippe de Côme aurait pu signaler également la Revue Europe parue en Aout/Septembre 1979, N°604/605, qui était consacrée à Maurice Leblanc et Arsène Lupin, ou encore l’étude de Didier Blonde paru aux éditions Métailié en 1992, Les voleurs de visages. De même dans la partie consacrée aux gentlemen cambrioleurs de la littérature, ont été oubliés deux auteurs (au moins) dont les personnages sont les épigones presque parfaits d’Arsène Lupin : Leslie Charteris créateur de Simon Templar alias Le Saint, et Alain Page qui mit en scène l’Ombre pour de nombreuses aventures publiées justement dans la collection L’Aventurier du Fleuve Noir. Ils correspondent plus aux critères lupiniens que certains des personnages présentés via leurs auteurs par Philippe de Côme. Enfin, il serait injuste de passer sous silence deux associations qui se réclament plus ou moins d’Arsène Lupin et de son créateur : association Les Amis d’Arsène Lupin, dont le siège social est situé au Clos Lupin, et l’association 813, les amis de la Littérature Policière, qui tire son nom d’un roman de Maurice Leblanc. Et puisque je suis dans les récriminations, le listage des romans et recueils avec les noms des nouvelles qui les composent aurait été le bienvenu. Au fait, j’oubliai : j’ai découvert un autre pseudonyme d’Arsène Lupin, qui figure en pages 4 & 6 puisqu’il est écrit ainsi : Arsen Lupin. Etonnant non ?
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