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FREDERIC DARD |
La PeuchèreAux éditions POINTSVisitez leur site |
1010Lectures depuisLe mercredi 10 Aout 2011
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Une lecture de |
À cette époque, Pierre Desflouve est âgé de treize ans. Il habite à Lyon avec ses parents. Guéri d’une congestion pulmonaire, un séjour de six mois en montagne dans les Alpes contribuera à le rétablir complètement. On l’envoie donc à Fond-Rochette, petit village de Maurienne. Il va loger dans la famille Serbelin. Le père est cordonnier. Durant la Première Guerre mondiale, il fut blessé et prisonnier en Bochie, comme il dit. Son fils Henri est un gaillard de dix-huit ans, qui adopte vite le petit Pierre. Employé chez le menuisier local, il fabrique des portes et des cercueils. Effectivement, le cimetière de Fond-Rochette témoigne qu’on y meurt beaucoup. Souvent il s’agit d’accidents de montagne, les touristes amateurs d’alpinisme n’étant pas épargnés. Le Paradis des Skieurs accueille ces clients. La population villageoise masculine fréquente plutôt le bistrot de Polyte. Chaque dimanche, on y joue à la belote entre amis, non sans quelques éclats. Pour le jeune Pierre, la personne la plus marquante ici, c’est Louise Serbelin, que l’on surnomme La Peuchère. L’épouse du cordonnier est une femme de quarante ans, petite et rondelette, très pieuse et protectrice. Originaire de Tarascon, elle garde une évidente nostalgie de sa Provence natale. C’est à son accent et à ses expressions du Sud qu’elle doit son sobriquet, ce qui ne la gêne guère. Pierre la considère déjà comme une seconde mère, bienveillante et attentive. Un étranger va s‘installer au village. Non pas un de ces touristes que le méfiants paysans du coin ignorent superbement : le nommé Carié est un monsieur tuberculeux venu de la ville. C’est auprès de la famille Serbelin que, lui aussi, va trouver refuge. Ce citadin athée a eu une vie agitée, d’après ce qu’il raconte. Il ne cherche pas vraiment à être apprécié de ceux qu’il considère comme des péquenots. Louise Serbelin et le curé organisent un banquet censé le rapprocher de la population. Ce n’est pas exactement une réussite. Surtout, ce Carié risque d’avoir une très mauvaise influence sur le jeune Serbelin… Écrit par Frédéric Dard à l’âge de dix-sept ans (vers 1938), cette longue nouvelle fut publiée en 1940 aux éditions Lugdunum. Ce premier livre de l’auteur n’est pas exempt de petits défauts, notamment des figures de styles sans doute copiées d’écrivains de l’époque. Notons même une légère erreur : l’horloge du clocher sonnant les trois heures “cela signifiait, pour les habitués, qu’il était deux heures quarante, car elle retardait de vingt bonnes minutes” (elle avançait, au contraire). Passons sur ces imperfections, car ce texte montre les qualités de l’écrivain en devenir. Frédéric Dard possède déjà une belle maîtrise de l’écriture. La narration, à la première personne, avance sans dévier du but que l’auteur s’est fixé, selon l’intrigue qu’il a en tête. On est en droit de penser que l’histoire fut écrite sans repentir. Les personnages, les décors et l’ambiance sont dessinés avec assurance. La tonalité allie habilement le témoignage à l’émotionnel. Dard se permet un peu d’humour, aussi. Quand des skieurs entonnent une chanson à boire, le menuisier ricane “— S’ils se cassent la figure, émit ce brave artisan du bois, ce ne sera plus le vin, mais la bière qui sera bonne… Et, ce disant, il tapota affectueusement le ventre vernissé d’un cercueil qui gémit lugubrement.” On peut reprendre la formule de Max-André Dazergues dans sa préface : “Frédéric Dard touche son public à l’endroit qu’il faut, le seul qui convienne : le cœur.” Ce livre prometteur fut à l’origine d’une brillante et longue carrière d’écrivain. |
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