villa quolibet de Patrice DELBOURG


Villa Quolibet DELBOURG383

PATRICE DELBOURG

Villa Quolibet


Aux éditions CHERCHE-MIDI


Visitez leur site

804

Lectures depuis
Le jeudi 28 Mai 2015

fleche Soutenez RayonPolar en achetant
villa quolibet
sur
Amazone


fleche
fleche

Patrice DELBOURG




Une lecture de
CLAUDE LE NOCHER

CLAUDE LE NOCHER  

Auguste Bléchard n'est plus un jeune homme, et n'a jamais été un travailleur manuel. De tous temps, constatant sa perpétuelle maladresse, sa famille ne lui accorda nulle vocation bricoleuse. Féru d'esthétisme calligraphique, ce scribe est devenu un copiste besogneux et stylé. Les poètes oubliés abscons l'inspirent davantage que les plus communs outils. Au décès de son géniteur si peu paternel, Auguste hérite de la maison des Bléchard. Si on la nommait jadis Villa des Glycines, il préfère l'appeler Villa Quolibet. De douces images sont attachées à cette demeure en meulière, typique de la banlieue-sud de Paris aux abords de ce qui fut la Nationale7. Il aime le calme, mais n'oublie pas ses racines : “Il est vrai que je viens d'une famille d'un naturel emporté, et chez nous la moindre contrariété pouvait se transformer séance tenante en esclandre public, en véritable bataille rangée. Mauvais coucheur sur plusieurs générations...” Auguste va être servi, question contrariétés.

La coquette Villa Quolibet de jadis s'apparente plutôt à une bicoque antédiluvienne, à une masure périmée, indigne même de son quartier vieillot. Son père qui jouait les ermites, à l'étage, n'a rien entretenu depuis des lustres. Tout se déglingue dans la bâtisse. Auguste, qui ignore tout du fonctionnement domestique, qui ne saurait que faire d'un tournevis ou d'un marteau, n'imagine pas réparer, restaurer, remettre simplement en état. S'agissant d'engager quelques ouvriers, Auguste se livre à un casting approximatif. Sept trimardeurs pittoresques sont retenus, probablement plus forts en gueule qu'efficaces. Il leur attribue un sobriquet à chacun, non sans remarquer qu'ils sont parfois un tantinet caractériels : “L'installateur sanitaire, qui ne tolère plus l'appellation obsolète et vulgaire de plombier, travaille seul en grommelant...” Dès le début des travaux, ça remue-ménage déjà.

Voilà un chantier qui prend vite des allures de pandémonium : “On pioche à l'ancienne, on entaille à la gorge, on pellanche à qui mieux mieux dans la glaise baveuse. L'atmosphère espiègle et débonnaire du chez-moi des vertes années avait bien changé. Beyrouth-ouest succédait à Barbizon... L'ampleur de l'intervention que j'avais initiée me dépassait par tous les pores de la peau. J'étais parti pour quelques légers rafistolages, et nous étions de plain-pied dans la remise en état du Pavillon de l'Arsenal.” Auguste sent bien qu'on raille son projet, qu'on abuse du pigeon qu'il est. Pourtant, vendre ce "nid à soucis", que nenni ! Certes, pas de place pour lui dans les jambes des gars du bâtiment chez lesquels il perçoit un net esprit clanique. Tant pis s'il doit s'isoler afin de poursuivre ses propres activités. Pas dans un coin, puisqu'il n'y en a plus. Alors, ce sera sur une sorte d'échafaudage branlant.

Seules ses sorties parisiennes, au cirque, le remontent le moral. Sans doute parce que, à l'inverse de son chantier bordélique incontrôlable, il n'y a quasiment pas d'improvisation dans un numéro de cirque. Auguste a connu dans sa vie des parenthèses sentimentales, aussi maladroites de sa part que le maniement d'une truelle ou d'une varlope. Avec Lilith, qui apparaît dans le décor chaotique sans crier gare, va se nouer une nouvelle relation. Le douloureux vécu de cette danseuse flamboyante ne peut que toucher l'esthète Auguste. Et surtout, Lilith va ici s'imposer, nettoyer, régenter, améliorer. Peut-être qu'un jour, la triste Villa Quolibet se métamorphosera en glorieuse Villa Alphabet ?…

Non, Patrice Delbourg ne se lance pas dans le roman criminel, dans l'intrigue polardeuse. Encore que ce passionné du langage, cet épris de vocabulaire, dresse en cette occasion des portraits qui ne dépareraient pas dans quelque roman noir. Son sombre héros (désolé) ne lui ressemble-t-il pas un peu ? “Je bricole la mécanique des mots… La littérature n'est pas une bourgeoise huppée. C'est une paysanne. Une âme toute simple comme vous. Elle est parente de l'instituteur des campagnes, de l'homme des écluses, du receveur des postes, parfois d'un collègue d'usine. L'écrivain, comme le maçon, est seul face à la performance, concentré dans ses starting-blocks, cassant le buste sur la ligne d'arrivée, célibataire au monde dans l'exercice de son unique effort.” En l’occurrence, l'écriture d'un livre peut effectivement ressembler à un chantier, certains auteurs en témoignent.

De péripéties, il n'en manquera point ici. Quiconque a été envahi par des travaux à son domicile connaît le plaisant agrément de la chose, le bonheur du bruyant colmatage et du déblaiement de poussiéreux gravats, la délicieuse sensation de pagaille généralisée et interminable, car surgissent les impondérables. Ce que l'on retiendra, par-dessus tout, c'est l'usage amoureux des mots. Les termes professionnels, bien sûr : herminette, rifloir, gouge, égoïne, chignole, serre-joint. Puis encore les “vocables radieux : aconit, courtille, faluche, jable, nocher, roquentin, ou mazette.” À titre personnel, “Doucement, à petit pas valétudinaires” me comble d'aise, tant j'aime ce mot "valétudinaire", un de mes préférés avec "matutinal". Le langage chante avec poésie, le vocabulaire est coloré, les mots rares pétillent. Merci à Patrice Delbourg de rendre vivants ces endormis des dictionnaires, ces fantômes de la langue française.

Retrouvez
CLAUDE LE NOCHER
sur
action-suspense.over-blog.com
 
livrenpoche
Chercher patrice delbourg



 
 



Pour être informé des Mises à Jour, Abonnez-vous à l'Hebdo du RayonPolar
Indiquez votre Mail

Les réclames du RayonPolar

Pour votre publicité, contactez le site

Pub sur RayonPolar

Sur les 32200 pages du Site
chiffres Google Le jeudi 3 Novembre 2011







En accédant à ce site marchand par l'intermédiaire de ce lien vous soutenez financièrement le RayonPolar






Site dédié au Polar-Film-Série
Si vous entrez directement sur cette page,
Retrouvez ses nouvelles en ligne, ses critiques de polars, de films, de séries TV
Sa liste de revues et sa galerie de couvertures de polars anciens.
Visitez le Rayon Polar
Il y a trois sortes de mensonges : les mensonges, les gros mensonges et les statistiques.
- Benjamin Disraeli (1804-1881), homme politique britannique















Pinterest
(C) Les textes n'engagent que leurs signataires
RayonPolar
Certaines illustrations de ce site sont des reprises des couvertures de la collection Néo et sont signées
Jean-Claude Claeys.

Reproduit ici avec son aimable autorisation
Pour visiter son Site
Pour acheter des originaux
Cliquez sur l'image
RayonPolar