|
|
JEAN-PAUL CHAUMEIL |
Parfois C'est Le Diable Qui Vous Sauve De L'enferAux éditions ROUERGUE NOIRVisitez leur site |
633Lectures depuisLe dimanche 16 Septembre 2018
|
Une lecture de |
Bérénice, l’épouse de Boris est morte à New York, le 11 septembre 2001. Quinze ans plus tard, en avril 2016, après avoir combattu les talibans en Afghanistan, Boris vit à Bordeaux, sur la dalle de Mériadeck, où il est détective privé. Même dans cette ville, plus bourgeoise que contestataire, on organise des Nuits Debout, des manifs contre la future Loi Travail. Une nuit, Boris sympathise avec Manuel, un Colombien au statut incertain. Alors qu’ils interviennent dans une ratonnade anti-homos, un homme est jeté dans le vide. C’était un policier qui infiltrait un mouvement de nazillons. Le coupable est un nommé Wolf, leader du Groupe Identitaire, l’ultra-droite. Boris obtient quelques infos grâce au commissaire avec lequel il entretient de bonnes relations. Ce dernier montre à Boris et Manuel une vidéo de la bagarre mortelle, où ils figurent sans être suspects. Mais sur les mêmes images, on reconnaît aussi Julia, la fille de Boris, qui semble s’être acoquinée avec le Groupe Identitaire. Après le décès de Bérénice, Julia fut élevée par la belle-sœur de Boris, Monica. Sa mère était plutôt "de gauche" très convaincue, petite-fille d’anarchistes catalans, que va faire Julia chez les activistes d’extrême droite ? Boris se fait une promesse : “Ce Wolf est un homme mort. Les terroristes ont pris ma femme ; le type de la droite ultra n’aura pas ma fille… Elle reviendra parmi les vivants, elle aura des enfants, ce Wolf restera une ombre perdue dans le noir de la nuit. Même si je dois mourir pour qu’il meure. S’il le faut, je l’accompagnerai en enfer…” Boris peut compter sur Manuel, ancien des FARC. Dans une vidéo, il voit que Julia a participé à un meeting du Groupe Identitaire. Elle lui adresse une lettre, dans laquelle elle reprend les thèmes de la propagande anti-musulmans. Un fanatisme décevant et surprenant pour son père. Journaliste gauchiste, "Carole" peut-elle vraiment être utile au combat qu’entame Boris ? Quant à Monica, inquiète du silence de Julia, elle espère sans doute trop de la police, pense le père de la jeune fille. Ahmed, qui milita contre l’extrême droite, pourra offrir des infos de qualité à Boris. Le commissaire ne cache pas à Boris que ses amis et lui sont sous surveillance, de même que le téléphone de Julia. Ce qui n’empêche pas Manuel et Boris de tenter une opération commando contre une grange, un des QG du Groupe Identitaire. Ils ne sont pas les seuls à connaître cette adresse : la DGSI et le Stups interviennent. Turan, agent de la DGSI, résume les choses pour Boris : tout en ciblant Wolf, les flics n’oublient pas que la sécurité publique reste une priorité. De son côté, Boris se renseigne sur les armes utilisées par les djihadistes lors des attentats. Ces "Tokarev" sont aussi les armes dont se sert le Groupe Identitaire. Trafic d’armes ou passerelles idéologiques ? Certaines réponses sur Julia, c’est Irène – la fille du commissaire – qui va les apporter à Boris, car elles ont été amies à la Fac. Le combat est encore loin d’être gagné pour le père de Julia…
Inscrire une fiction dans une actualité encore récente et sensible est un pari risqué. Les faits en question ont une portée politique. Chaque lecteur aborde ces sujets avec son opinion, forcément tant soit peu partisane. Jean-Paul Chaumeil en est assurément conscient. Aussi son héros – sans être neutre – reste dans son rôle d’ex-baroudeur. Il a une mission à accomplir : sauver sa fille, en la tirant des griffes d’un groupuscule prêt à répliquer aux attentats djihadistes en commettant des opérations violentes. Sachant que dans tous les camps, le banditisme va de pair avec le prétexte politico-religieux, voire racial. Tout ça se passe dans un contexte où la tension monte au sein de la population – Nuits debout et manifs. Et où certains veulent faire croire que les forces de sécurité françaises (anti-terrorisme) ne seraient pas efficaces. C’est avec une belle maîtrise que l’auteur présente la situation, un bon exemple d’Histoire immédiate. Roman noir sociétal et roman d’action à la fois, après l’excellent “Ground Zero”, ce nouveau titre de Jean-Paul Chaumeil s’avère également très convaincant. |