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Franco La MuerteAux éditions ARCANE 17Visitez leur site |
2593Lectures depuisLe mercredi 2 Septembre 2015
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Une lecture de |
Le 20 novembre 1975, l'Espagne perdait son chef absolu, "Generalísimo Francisco Franco, Caudillo de España por la Gracia de Dios". Les caciques franquistes ne risquaient rien, car le défunt avait exigé que "aucune chasse aux sorcières contre des militaires ou des membres de l'administration ne serait effectuée en cas de démocratisation du régime." On vit plus tard un quarteron de militaires tenter un coup d'état, un putsch qui fit pschitt. La population espagnole tourna la page du régime de Franco. Les plaies de la Guerre de 1936 n'étaient pourtant pas encore refermées pour tout le monde. Beaucoup de ceux qui durent quitter leur pays à cause de la domination violente des nationalistes, pouvaient-ils effacer d'un seul coup des décennies de despotisme ? Le décès trop paisible de Franco laissait une certaine amertume, également, chez les activistes continuant à combattre son régime. Quarante ans ont passé. Un anniversaire en demie-teinte, peut-être. Même imparfaite, comme partout, la démocratie a permis à l'Espagne d'évoluer. Le franquisme appartient au passé. Ce qui n'empêche pas de se souvenir, pour éviter de semblables erreurs. Dans ce recueil, une vingtaine d'auteurs nous proposent des textes traduisant leur perception du franquisme, d'hier à aujourd'hui. Que leur regard soit plutôt militant ou davantage en décalage, ces nouvelles sont une forme d'hommage à ceux qui s'opposèrent à Franco. Patrick Amand garde une image militante et contrastée de l'Espagne. Il s'interroge : que se serait-il passé si, en juin 1951, un commando anti-franquiste de la CNT s'était introduit et caché dans le vaste parc du Pardo ? En ce lieu où Franco prenait plaisir à chasser avec quelques-uns de ses courtisans ? Alain Bellet évoque un prestigieux comité d'accueil pour le dictateur, composé des témoins de ses atrocités d'antan. Antoine Blocier nous parle du village de Janovas, jadis évacué manu militari en vue de la construction d'un barrage. La famille Grimau Cordero fut persécutée et dut s'exiler en France, tandis qu'un ex-franquiste figure toujours parmi les notables de la région. Frédéric Bertin-Denis raconte comment le jeune gardien de chèvres Pedro se retrouva prisonnier politique communiste en 1942. Il put recevoir une base éducative et, après avoir réussi à s'évader, il poursuivit le combat jusqu'au bout. Avec Didier Daeninckx, on est au début des années 1950 dans la région de Lyon, où la police traque sans ménagement un gang d'Espagnols. Pas hostile aux anars, l'inspecteur Bernabé approfondit l'enquête, pour faire la part des choses entre banditisme et résistance anti-franquiste. La photo d'un avion le renvoie à une tentative visant Franco. Retour en 1976 pour Jeanne Desaubry, quand la naïve étudiante Valérie a la malchance de rencontrer au Quartier Latin le séduisant Miguel. Un dangereux jeune homme, dont les hautes fonctions du père en Espagne lui assurent l'impunité. Pierre Domenges nous parle d'Esteban : vingt ans après la mort de Franco, est-ce que l'hypnose l'aidera à élucider le secret de son enfance, de sa filiation avec un dignitaire proche du Caudillo ? Avec Maurice Gouiran, retrouvons Madrid un 20 novembre. Cérémonies en l'honneur de Primo de Rivera et de Franco, retrouvailles entre fachos des mouvements d'extrême-droite européens. Le petit-fils d'une victime de la dictature a organisé un supplément de spectacle, sur le site de la basilique de la Valle de Los Caídos. Sophie Loubière se substitue au jeune Franco, plein de hargne contre son père qui humiliait sa famille. Militaire en devenir, l'ambition planifiée du futur Caudillo est de dominer, d'être le plus puissant, d'avoir ses propres armoiries. Roger Martin imagine un courrier reçu par Robert Ménard : la fille d'un héros méconnu de l'anti-communisme, qui fut au service de l'OAS puis des GAL espagnols, ne mériterait-il pas un hommage officiel de la part du maire de Béziers ? Dont le parcours idéologique fut également sinueux. Chantal Montellier rappelle l'exécution au garrot, en 1974 alors que ce supplice remontait à l'Antiquité, de Salvador Puig y Antich, opposant au franquisme. Une prof française du même âge, vingt-six ans, se déchaîne alors dans les caricatures qu'elle publie contre le régime de Franco. Ce qui échauffe les autorités espagnoles, et excite les RG., qui comptent la piéger. Max Obione présente M.Ramon et l'étudiante Juliette, qui loge chez lui et l'assiste. Elle découvre le Panthéon des martyrs du vieux monsieur, puis l'accompagne dans son pèlerinage en Espagne. Visiter les hauts-lieux de la mémoire franquiste, ça soulage M.Ramon. Gérard Streiff relate le marathon médical des dernières semaines de Franco. L'agonie fut suivie en détail par JBM, journaliste français d'une agence de presse à Madrid, informé à la source. On aurait pu prolonger longtemps la survie du vieux tyran. Il y avait tant d'enjeux dans sa succession, et tant de scoops sur son état de santé… Puis encore des nouvelles signées Patrick Fort, Gildas Girodeau, Hervé Le Corre, Jacques Mondoloni, Ricardo Montserrat, Jean-Hugues Oppel, Maria Torres Celada. Autant de facettes, fictives mais malgré tout si proches des faits historiques, pour se remémorer l'anniversaire de la fin d'une dictature qui s'éternisait, si près de chez nous.
Parution le 27 aout 2015. 280 pages. 21,00€. Vienne le temps des poésies Qui te videront de ton lit Quand nos couteaux feront leur nid Au cœur de ta dernière nuit Franco la muerte. Léo Ferré.
Cela fera bientôt quarante ans que l'Espagne ne vit plus sous la férule franquiste ! Afin de le faire se retourner dans sa tombe, vingt auteurs se sont mobilisés sous la houlette de Gérard Streiff, afin de commémorer non pas Franco mais sa mort qui signifiait la délivrance de l'Espagne. Un événement fêté comme il se doit par vingt plumes qui nous ramènent quelques décennies en arrière, lorsque l'ombre du franquisme obscurcissait le ciel ibérique.
Patrick Amand nous offre avec Moi et Franco une histoire personnelle, un récit qu'un ancien Espagnol lui aurait confié alors que Patrick Amand racontait à une tablée que Gérard Streiff, le coordinateur de l'ouvrage, lui avait commandé un texte. L'homme avoue que son père avait rêvé tuer Franco au lieu que celui-ci décède tranquillement sur son lit. Et c'est bien cette envie de se débarrasser de Franco, les tentatives avortées, qui ont inspiré quelques-uns des auteurs ayant participé à ce recueil. D'autres attentats sont narrés dont deux mettant en scène le personnage du général Luis Carrero Blanco, premier ministre espagnol, décédé le 20 décembre 1973 dans une opération menée par l'ETA. Version officielle. La mise en scène de cet épisode est particulièrement bien décrite par Gildas Girodeau tandis que Patrick Fort s'empare de cette histoire pour nous fournir une vision plus personnelle avec une femme qui a toutes les raisons de déplorer la mort d'un individu honni par une grande partie de la population. Si de nombreux Espagnols ont franchi la frontière au début de la guerre civile de 1936 puis après, lors de la Retirada par exemple, ou profitant de différentes situations pour quitter le sol natal, Franco pouyvait compter sur de nombreux soutiens, surtout parmi le clergé et les catholiques intégristes, mais également les racistes, les anticommunistes. L'abbaye de Santa Cruz del Valle de los Caídos, un monument commandé par Franco pour rendre hommage aux héros et martyrs de la Croisade, c'est à dire les Nationalistes regroupés sous sa bannière, puis transformée en mausolée à l'intention de tous les combattants Nationalistes et Républicain à condition qu'ils soient de confession catholique (!) est tous les ans le lieu de pèlerinage des fervents du régime franquiste. De ceux qui perpétuent la mémoire du général, et de ses exactions, tout comme les nouveaux nazis sont fanatiques des emblèmes hitlériens. Mais se déplacent également les curieux, les touristes, et certains vieux Espagnols qui veulent vérifier que le Caudillo est bien décédé. Max Obione, dans Los Caídos, nous en présente un, dans une histoire dont le dénouement est à pisser de rire. Si la plupart de ces nouvelles sont situées durant la dictature franquiste, quelques-unes sont plus contemporaines, ainsi que nous le démontre Jeanne Desaubry. Une nouvelle dans laquelle l'héroïne est une jeune provinciale, guère délurée, montée à Paris afin de suivre les cours à la Sorbonne. Elle désire voir le film de Carlos Saura, Cria Cuervos, dont la musique du film, Porque te vas a été immortalisée par Jeanette en 1976. Valérie l'étudiante en subira des dommages collatéraux. Roger Martin s'attaque au GAL, Groupe Antiterroriste de Libération, des commandos para-policiers et paramilitaires dont le but était de contrer les offensives de l'ETA en employant des méthodes illégales et dont le nom était significatif comme les Guérilleros du Christ-Roi. Roger Martin s'est spécialisé dans la dénonciation du fascisme en général et avait déjà mis en scène le GAL dans un épisode du Poulpe, Le GAL... l'égout. On ne pourra manquer rapprocher le titre de la nouvelle de Jean-Hugues Oppel, Je ne suis pas Franco, à des déclarations formulées en début d'année, un mantra que répète inlassablement un prisonnier face à ses bourreaux. Tandis qu'Alain Bellet préfère tourner en dérision la mort de Franco le catholique, Antoine Blocier revient sur un des épisodes du franquisme, la construction de barrages inutiles destinés à déplacer la population.
Résumer chaque nouvelle est un peu fastidieux, je le concède, aussi je vous propose un regard d'ensemble grâce au sommaire ci-dessous puis si vous désirez en savoir plus, je vous conseille un petit tour chez mon ami Pierre de BlackNovel1 qui les présente une par une avec talent.
Avant-propos de Gérard Streiff. Patrick Amand : Moi et Franco. Alain Bellet : Le banquet du bas monde. Antoine Blocier : Mon village fantôme. Frédéric Bertin-Denis : Mauricio Lopez est communiste. Didier Daeninckx : Le raid du F-BEQB. Jeanne Desaubry : Porque te vas. Pierre Domenges : Le cimetière des deux mères. Maurice Gouiran : L'ombre de la Santa Cruz. Gildas Girodeau : El Ogro (L'Ogre). Patrick Fort : A quelques minutes près... Hervé Le Corre : Franco : la muerte. Sophie Loubière : Gratia plena. Roger Martin : GAL-OAS. Jacques Mondoloni : Les couacs Franco. Ricardo Montserrat : Decimas. Chantal Montellier : Garrots-gorille. Max Obione : Los Caídos. Jean-Hugues Oppel : Je ne suis pas franco. Gérard Streiff : La faute du toubib. Maria Torres-Celada : Les vivants et les morts.
Un recueil Franco de porc et de déballage... |
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