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ANDREA CAMILLERI |
Le Neveu Du NégusAux éditions FAYARDVisitez leur site |
2531Lectures depuisLe mardi 19 Mars 2013
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Une lecture de |
1929, le régime fasciste est désormais installé en Italie, idolâtrant son clairvoyant chef Mussolini. En Sicile, l’École des Mines de Vigàta comptera dès cette rentrée un étudiant Noir, venu y poursuivre sa scolarité. La prudence s’impose au sujet de prince Ghrané Solassié, neveu du Négus d’Éthiopie, Haïlé Sélassié. Le Duce ayant des vues expansionniste sur l’Abyssinie, il convient de traiter avec grands égards cet étudiant. Nul ne voit d’inconvénient à le côtoyer, sauf M.Müller, Allemand nazi de la première heure, inquiet d’une telle fréquentation pour son fils. L’information a circulé à Vigàta comme à Montelusa, entre École des Mines, préfecture, siège local du parti, commissariat de police, et dans l’ensemble de la population. On a trouvé une pension de famille qui va héberger l’étudiant, au frais de l’État. C’est qu’on espère qu’il vantera la générosité des Italiens auprès de son oncle. À son arrivée, le prince Ghrané est sous surveillance policière. Débarquant du train sans bagages, pauvrement vêtu, il affirme avoir été détroussé à bord par deux voyageurs. Un geste politique, estime le parti fasciste local. Ce qui ne va pas empêcher Ghrané de faire un détour par le principal bordel de Vigàta, sans payer les passes. Le commissaire Spera comprend tôt qu’il s’agit d’une source d’ennuis. Peu après, le prince est hospitalisé, souffrant d’inappétence. Là encore, on peut vérifier son goût pour les belles femmes. On comprend que Ghrané a besoin d’une famille d’accueil. Âgée de dix-sept ans, vivant avec son père veuf, amoureuse du beau prince Noir, Ninetta (Antonietta) est ravie de l’accueillir chez eux. Pas bien difficile de deviner la combine qu’ils ont monté, mais les officiels n’y voient que du feu. Et continuent à financer tous les besoins du neveu du Négus. De grosses sommes sont dilapidées dans l’opération autour du prince. Puisqu’on insiste pour qu’il écrive à son oncle une lettre favorable au régime italien, Ghrané négocie et dépense énormément. Hormis ces tractations tous azimuts, il trouve de l’argent auprès du fils Müller, homosexuel épris de lui. Une rencontre à Rome avec le Duce serait un grand projet, mais le prince n’y tient guère. S’il arrange un mariage pour le père de Ninetta, c’est qu’il a son idée. Il cause quelques troubles çà et là, mais préfecture et parti fasciste local s’arrangent pour éviter le scandale. Quand on pense que la mine locale est ensorcelée, un simulacre d’exorcisme suffit à calmer les rumeurs, bien qu’on puisse soupçonner le prince. Il sème encore la pagaille au Cercle des Nobles de Montelusa, qui feraient mieux de ne pas réagir. L’étudiant finit par prendre le train pour Rome, où il doit rencontrer Mussolini… À l’origine de cette histoire, il y a un fait réel, un neveu d’Haïlé Sélassié ayant réellement étudié dans une École des Mines sicilienne à l’époque. Andrea Camilleri a entièrement réinventé cet épisode, qui ne causa nul troubles comparables avec ceux de sa fiction. C’est sous forme de “pièces du dossier” (et non d’un roman linéaire) qu’il nous présente la curieuse affaire. Échanges de conversations, de courriers, de rapports, de télégrammes, d’impressions, qui nous permettent de cerner les faits. Avec une ironie grinçante, il nous montre la bureaucratie fasciste dans toute sa ridicule splendeur, avec ses combinaisons politicardes, sa certitude de tout contrôler. Au final, une opération aussi onéreuse que chimérique. Bien avant le célèbre policier Salvo Montalbano, il existait déjà un commissaire de police très compétent à Vigàta. Giacomo Spera n’est jamais vraiment dupe du jeu auquel s’amuse Ghrané Solassié, rusé prince abyssin. Une lucidité de l’enquêteur qui lui fera risquer des sanctions… Même en connaissant son œuvre, on ne peut qu’être admiratifs devant la virtuosité d’Andrea Camilleri. Car l’intrigue n’a rien de simpliste et, si la tonalité nous fait sourire, la caricature de l’imbécillité générale apparaît fort juste. Ce n’est pas encore cette fois que le Maestro sicilien décevra ses admirateurs. |
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