Comme son titre l’indique, l’univers des nouvelles de Lucie Chenu s’articule surtout autour des enfants, avec une pointe de magie, d’angoisse, de fantastique, de féérie poétique. L’inspiration nait dans un ressenti, une émotion, une image, une extrapolation de faits divers issus le plus souvent de petits événements vécus par l’auteur, ou encore un défi entre auteurs, des mots imposés, un premier paragraphe suggéré. Une interversion entre réalité et virtuel, un prolongement rêvé, ou cauchemardé, une extrapolation de situations de la vie courante. Ainsi l’histoire d’une petite fille et de sa mère se promenant dans la campagne et narrée dans Vent d’Autan relève d’un événement réel mais exploité avec une légère transposition, ainsi que dans Carnaval dont le titre est tout un symbole ou encore dans La source qui prend son origine par une journée de grosse chaleur alors que l’auteur rêvait d’une bonne douche. Autres personnages récurrents, les animaux quels qu’ils soient. Les oiseaux dans Les aigles de Valmy, parc ornithologique près de Banyuls qui offre des attractions touristiques avec des perroquets, des rapaces, des cigognes et bien évidemment des aigles. Seulement la représentation ne se déroule pas comme les autres jours, les oiseaux sont nerveux et les cigognes perdent chacune une plume sur des enfants, tandis qu’une femme se comporte bizarrement. Le village-aux-chats nous entraine dans le sillage de ces contes animaliers chers à Perrault et ses confrères, tandis que dans Ecoutez la légende tout se joue sur la chute, tout comme dans Guide de la métamorphose animale à l’usage des sorciers débutants. L’utopie n’est pas loin comme dans Traitement de texte, une nouvelle répondant aux trois lois de la robotique édictées par Isaac Asimov. D’autres détonnent comme Les trois sabres, dont on pourrait trouver une inspiration japonaise mais le jeu de tarot sert de déclencheur, ou Le théâtre de Barbe-Bleue qui pourrait illustrer l’un des sept péchés capitaux : la gourmandise. Sans vouloir véritablement passer un message politique, Lucie Chenu n’oublie pas les préoccupations actuelles, principalement les ségrégations et les discriminations, les outrages et les humiliations subies par les femmes, les animaux et la nature. Mais ceux-ci peuvent se venger, il ne faut pas l’oublier. Ce qui prime toutefois dans ces nouvelles c’est la tendresse qui s’en dégage, même si elle n’est pas forcément apparente. Certaines de ces nouvelles, écrites à deux, quatre ou même six mains, ont été déjà éditées dans de petits fanzines ou sur le net mais elles méritaient une audience plus large. J’espère que via Rivière blanche ce sera effectif, ce qui ne serait que justice. Ce livre est accompagné d’une très belle préface de Nathalie Dau et de dix neuf hommages écrit par, entre autres, Jean-Pierre Andrevon, Jean-Michel Calvez, Claude Ecken, Noé Gaillard, Pierre Gévart ou encore Joëlle Wintrebert.
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