COLLECTIF

Après “Petite Ceinture” et “Bains Douches”, Arnaud de Montjoye et Jean Distel nous présentent un nouveau recueil de nouvelles (dédié au regretté Jacky Pop, qui contribua aux précédents). Chaque texte s’inspire d’une photo noir & blanc de J.Distel.

Il est bien désuet, le monde des Objets Trouvés. Aujourd’hui, qui se soucie d’une montre sans valeur (même pas affective) ou d’un parapluie abîmé, oubliés quelque part, peut-être abandonnés ? À Paris, qui ira jusqu’au 36 rue des Morillons récupérer un képi perdu, un cabas vide, une statuette ringarde, ou un Nounours fatigué, déjà remplacés par des neufs ? Cet amas d’objets répertoriés, attendant leurs propriétaires, apparaît décalé dans notre époque ultra consommatrice.

Dix-huit auteurs racontent ici une histoire d’Objets Trouvés. Tel Patrick Delahais, avec ce policier alcoolique qui, ayant fait une tournée des bistrots mouvementée la veille, a égaré sa carte de police ; ivre, il l’a confondue avec une autre carte. Jacques Astruc évoque un homme, recueilli en 1943, recherchant la trace de sa mère. Le magistrat et romancier Jean-Michel Lambert aborde un sujet similaire : enfant abandonné, un étudiant employé aux Objets Trouvés supprime des pauvres gens trop honnêtes. Georges Foveau suit l’enquête de l’inspecteur Dugommier, sur la piste du propriétaire d’une béquille, d’une jambe artificielle, et d’un fauteuil roulant ; le policier ignore qu’il passe à côté de singulières amputations. Le héros de François Vallejo est hospitalisé ; grâce à une aide-soignante exigeant rétribution, il espère retrouver sa canne, ayant appartenu à Antonin Artaud, convoitée par des collectionneurs d‘épées.

Jean-Noël Martin imagine des discussions entre divers objets perdus, rangés dans leur local de la rue des Morillons. Régine Detambel décrit l’audition par le commissaire Barral d’un volumineux suspect, qui tourne au débat sur l’abus de nourriture. Nouveau retraité, le héros de Patrick Ottaviani est demandé en mariage par une Miss ravissante et déjantée, prête à le suivre en Sibérie. Arnaud de Montjoye raconte la rencontre entre Albert, ayant perdu la montre d’un combattant de la guerre civile espagnole, et une vieille dame, militante qui connut des déboires à la Libération. Françoise Rachmuhl fait le parallèle entre de vieux sac à dos usés, et des héros voyageurs comme Ulysse et Rimbaud, ou marqués par le destin, comme Anne Franck.

Avec également des nouvelles signées : Brigitte Aubonnet, Guillaume Bourain, Claude Chanaud, Phlippe Deblaise, Nathalie Marx, Jean-Michel Platier, Chantal Portillo, Francis Vladimir. Tous apportent leur imaginaire, leur fantaisie et leur sensibilité pour faire vivre ces objets déclassés, recalés, rejetés. Occasion d’évoquer des personnages souvent insolites, bien sûr. Ces textes offrent une jolie balade parmi les babioles qui, souvent, sont le témoignage d’un moment de la vie.