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YVONNE BESSON |
Double Dames Contre La MortAux éditions LA TABLE RONDEVisitez leur site |
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Une lecture de |
Deux gosses, que la curiosité taraude, s'introduisent dans une des riches demeures érigées « plus près du ciel que de l'eau », à l'arrogance et l'exubérance des années folles qui peuplent Dinard. Dans le salon de la villa, ils découvrent le cadavre nu d'une femme inconnue. Pris de panique, ils tentent de fuir, mais la police les intercepte au coin de la rue. L'identification de la morte se révèlera plus difficile que prévu. L'assassin avait dépouillé le corps de ses vêtements et autres signes distinctifs. Dans un premier temps, la police soupçonnera le fils du propriétaire de la villa. Celui-ci ayant séjourné en compagnie d'un groupe de fêtards dans la demeure au moment du crime. Solution trop simple qui se révélera erronée. Lorsqu'elle aperçoit la photo de la victime, Carole Riou est saisie d'un étrange malaise. Mais cette affaire ne concerne pas la brigade de Marville, aussi ne cherche-t-elle pas à en déterminer l'origine. « Ils passent Muriel, d'Alain Resnais, à minuit… » lui annonce un ami au court d'une soirée, avant de rajouter « tu es assurée de plonger en cinq minutes dans le plus profond sommeil ! » Muriel ! le prénom de sa cousine, retrouvée le crâne défoncé, une trentaine d'années plus tôt, sur la plage de Dinard. Et c'est cette cousine qu'elle avait inconsciemment connue sur la photo de l'inconnue ! Cette même nuit, au court d'une intervention, son ami et collègue Modard est gravement blessé. Carole, profondément démoralisée par ce nouveau drame qui la frappe, sur les conseils de son supérieur prendra quelques jours de repos… elle partira pour Dinard, retrouver une autre cousine, perdue de vue depuis une éternité, découvrir la vérité sur Muriel, se réapproprier son histoire personnelle. Un auteur a la possibilité de construire un monde. « Non pas le monde, mais un monde, cela veut dire construire les ramifications de la complexité qu'il y a entre les personnages que tu utilises, les citations, les mythes, les références, les lieux symboliques, les lieux de mémoire » Manuel Vasquez Montalban dans Mouvement 15/16. Yvonne Besson, dans le troisième volet de sa série des Carole Riou, poursuit cette lente et méticuleuse construction. Les lieux géographiques sont connus depuis le premier volume : Dinard, « Perle de la Côte d'Emeraude », ses plages, sa promenade en bord de mer le long d'une corniche bordée de palmiers ; la Rance et son barrage ; Saint-Malo, la cité de tous les corsaires ; l'irréel Marville perdu dans un monde pluvieux, brumeux en bordure d'une mer glaciale et sombre. L'histoire immédiate de Carole Riou n'est plus à découvrir : un mari mort « dans ses bras » lors d'un accident de la route ; un milieu professionnel hostile et machiste ; un lourd traumatisme ; une solitude intense ; un idéalisme rivé au corps. Dans ce troisième volet, Yvonne Besson s'attelle à la construction des lieux de mémoire lointaine, sur fond d'histoire collective et familiale. Carole se souvient de sa mère comme d'une femme insensible et sans pitié, quant à son père, sa mémoire ne conserve de lui que l'image imprécise d'un petit homme effacé, qui passa sa vie à bourlinguer sur les océans. Aux souvenirs confus de ses parents se mêlent ceux de sa lointaine famille, de la misère, du quartier des Cognets, d'un amoncellement de baraques et de cages à lapins, peuplé de bolcheviques. Ce monde complexe, que bâtit Yvonne Besson, prend corps au fils des pages, dans un mouvement dialectique, qu'elle utilise, aussi bien, pour tisser l'écheveau de son intrigue, que pour expliquer les motivations de son héroïne, ou encore pour nous la dévoiler dans sa reconstruction, dans l'appropriation de son passé. Le crime surgi du passé expliquerait-il celui d'aujourd'hui ? Ou bien serait-ce celui d’aujourd’hui qui résoudrait le passé ? Et ce jeu des réminiscences et des correspondances entre le présent et le passé se poursuivra jusqu'au dénouement qui se devait d'être Hitchcockien… digne des moments forts de Psychose.
Editions de La Table Ronde. Parution 9 juin 2002. 326 pages. ISBN : 978-2710324676 Réédition Pocket Policier. Parution 5 juillet 2007. 370 pages. ISBN : 978-2266157094 Dinard. Une ville touristique décrite sous un angle guère flatteur. Deux adolescents, en quête de frissons dans une ville noyée sous la pluie s’introduisent dans une villa inoccupée. L’horreur : la salle à manger est dévastée, pire le cadavre d’une femme nue gît sur le tapis. Si les soupçons se portent au début de l’enquête sur les deux gamins fouineurs, les policiers abandonnent vite la piste. En l’absence de renseignements, ils diffusent la photo de la jeune morte. Carole Riou, en poste à Marville, est interloquée non seulement par ce drame qui s’est déroulé dans sa ville natale, mais de plus parce que le visage du cadavre lui rappelle vaguement quelques chose. Tant pis pour Manu, son amoureux libraire, elle se déplace à Dinard et mène parallèlement à la police officielle ses propres investigations.
Lorsque le présent et le passé se rejoignent, se télescopent, s’emberlificotent dans des apparences trompeuses, cela donne la trame à un roman plein de rebondissements dont se joue à merveille Yvonne Besson qui avait, dès son premier roman Meurtre à l’antique chez le même éditeur, trouvé un ton juste. Carole Riou gagne en épaisseur (c’est une image !) et surtout en humanisme. Elle plonge dans son passé pour comprendre ce qui ne pourrait être qu’un fait-divers hors saison. Si bizarrement les coïncidences émergent, c’est parce qu’elles sont crédibles. Les personnages sont fouillés, l’intrigue est solide, le décor envoûtant. Et Dinard n’est plus la petite ville touristique bon chic, bon genre. Mais ne croyez pas qu’il s’agit là d’une exception. Yvonne Besson est elle même originaire de ce coin de Bretagne, mais l’histoire aurait très bien pu se passer ailleurs, chez vous peut-être. Plus qu’un roman de plage, c’est un roman de prix.
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