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OLIVIER BARDE-CABUCON |
Le Détective De FreudAux éditions BABELVisitez leur site |
537Lectures depuisLe mardi 19 Septembre 2017
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Une lecture de |
Âgé de trente ans, le docteur du Barrail assiste à Weimar au congrès de 1911 qui réunit, autour de Sigmund Freud et Carl Gustav Jung, le gratin des psychanalystes. À l’issue des rencontres, du Barrail se voit confier une mission par Freud. À Paris, leur confrère Victor Gernereau vient d’être assassiné. Grâce aux notes sur ses patients que la victime adressa à Freud, il doit être possible d’identifier le criminel. Si du Barrail est enthousiaste quant à l’évolution de la psychanalyse, et s’il est conscient que c’est un honneur d’enquêter pour Sigmund Freud, il n’est pas sûr d’aboutir. Dans le train du retour vers Paris, où Jung va séjourner quelques temps, celui-ci lui recommande un détective privé, Max Engel. À plusieurs reprises, on tente de voler à du Barrail les notes de Gernereau. La coupable, il l’a repérée : c’est une femme toute vêtue de vert. Quand le psy s’adresse à Max Engel, il lui demande de s’intéresser en particulier à elle. Du Barrail possède certaines affinités avec ce curieux détective, qui affiche ses convictions sociales marxistes. Par ailleurs, c’est un jouisseur qui ne s’interdit ni le sexe, ni les bons repas arrosés. Outre la Dame en vert, la police a interrogé trois patients du psy Gernereau, de possibles suspects. Du Barrail commence par contacter Marie Adendorff, surnommée la Dame aux Loups à cause de ses troubles. Cette jeune sculptrice est la fille d’un homme d’affaires très puissant. Le détective a pisté la Dame en vert jusque dans un bordel où elle exerce ponctuellement. Il trouve quelques occasions de ne pas perdre de vue celle qu’on appelle Marie-Madeleine, en référence à la pécheresse biblique. Il poursuit sa filature, tandis que du Barrail se rapproche de Marie Adendorff, masquant à peine son attirance. Dans la veine freudienne qui relie enfance et sexe, le psy imagine que le père de la jeune femme a pu se rendre coupable d’inceste par le passé. Éventualité qui lui apparaît bientôt trop simpliste. Encore ignore-t-il le singulier parcours de cet homme, remarié à la jeune Aniela. Celle-ci défend avec ardeur les droits des femmes, y compris auprès du député Mirepoix. Marie-Madeleine tente de séduire du Barrail afin d’obtenir les documents de Gernereau. Avec l’accord de son commanditaire, elle va même tenter de corrompre Max Engel. Ce dernier reste en contact avec Carl Gustav Jung, celui-ci n’étant pas opposé à ce qu’ils fréquentent ensemble une maison close. Du Barrail interroge également les deux autres patients névrosés de Gernereau, mais sans doute devra-t-il élargir son enquête. La Dame en vert n’avançant guère, l’individu qui l’a chargée de retrouver les documents ne cache pas sa nervosité. Pour Max comme pour le psychanalyste, c’est probablement dans le cercle autour du père de Marie Adendorff que se trouvent les réponses aux questions… (Extrait) “— Mais si l’assassin a tué Gernereau et récupéré ses notes, pourquoi vouloir s’emparer de la copie de celles-ci ? Pour les faire disparaître ? Vous auriez pu, vous-même ou Freud, en recopier d’autres exemplaires. Non, à mon avis, quelqu’un a payé la Dame en vert pour récupérer ces notes du vivant du docteur Gernereau. Elle s’est ainsi présentée comme patiente de celui-ci pour se les procurer. Elle a dû échouer. Ce même commanditaire a ensuite fait assassiner le docteur mais, pour une raison inconnue, l’assassin n’a trouvé aucune note chez Gernereau. Consultez-les donc à votre banque seulement, je vous le répète. — Mais pourquoi voulait-il ces notes ? — Ce n’est pas à vous que je vais apprendre que l’on dit parfois à son psychanalyste des choses depuis très longtemps enfouies et oubliées… Qui sait si la personne n’a pas regretté que ces choses soient remontées à la surface. Vous êtes des apprentis sorciers, vous tenez boucherie ouverte de nos âmes !” Les six aventures du chevalier de Volnay, commissaire aux morts étranges au temps de Louis XV, ont apporté une notoriété méritée à l’auteur, Olivier Barde-Cabuçon. Avant d’entamer cette série, il publia “Le détective de Freud”, désormais disponible dans la collection Babel Noir. Toute autre époque, puisque nous voici au début du 20e siècle. Si la psychanalyse se développe dans les pays occidentaux, elle reste une science qui a tout à prouver. Certaines bases établies par Sigmund Freud sont, sinon contestées, du moins relativisées par son dauphin désigné, Jung. Et la médecine se méfie de ces confrères qui prétendent déterminer ce qu’il y a dans la tête des patients. Peut-on dire qu’une enquête ressemble beaucoup à une analyse psy, comme le suggère Freud ? Plus ou moins. En tout cas, Oliver Barde-Cabuçon n’ignore pas qu’un polar historique n’est pas simplement un étalage d’érudition. Il doit être, avant tout, doté d’une véritable intrigue. L’affaire criminelle et la recherche des coupables, c’est le moteur de ce type de romans. Ce qui n’empêche nullement d’inscrire le récit dans un contexte précis, dessinant diverses facettes de l’ambiance d’alors. Ici, il n’est pas question que de psychanalyse. Certes, les images de l’enfance – dont font partie les contes de fées – ont une importance évidente pour les patients que rencontrent le docteur du Barrail. Mais depuis la seconde moitié du 19e siècle, les luttes sociales n’ont cessé de gagner en union et en force. Nous sommes en 1911, le prolétariat bouge, se fait entendre, refuse l’exploitation par le grand capital. C’est le détective Max Engel qui est porteur de tous ces symboles ouvriers. Par ailleurs, voilà quelques années qu’en ce début de 20e siècle, des femmes – les suffragettes – revendiquent des droits bien réels. Même si des officiels s’avèrent bienveillants envers ces mouvements, peu de concrétisation en vue. Aniela Adendorff en est, en quelque sorte, la porte-parole dans cette histoire. Ce suspense aussi riche en péripéties que par son contexte est fort séduisant. |
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