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BENOTMAN-BIBERF |
CocoAux éditions ECORCEVisitez leur site |
267Lectures depuisLe jeudi 21 Decembre 2012
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Une lecture de |
Le perroquet Coco vivait en des temps fort cruels. Dès sa naissance, qui n’eut rien d’ordinaire on vous prie de le croire, il fut plongé dans le monde de la piraterie. Ce ne fut point un noble flibustier ou le plus digne des corsaires, qui recueillit Coco. Non, il eut pour maître le pire des pirates, le sanglant Pitt-Haines. Celui-ci “était fort bel homme et, bien qu’amputé d’une jambe en dessous le genoux, privé d’une main à la hauteur du poignet, énucléé d’un globe oculaire et la bourse allégée d’un testicule, il restait d’une agréable physionomie due à une digne prestance morale et à un téméraire courage à toute épreuve.” Commandant son vaisseau Le Grappin, Pitt-Haines était néanmoins sans pitié. En guise de boulets de canon, il n’était pas rare qu’il utilise les têtes des ses malheureux ennemis. On vous l’a dit, les mauviettes ne résistaient pas à la cruauté de cette époque. Éduqué par le savantissime et tatoué Lascie Lampute, Coco, volatile intelligent, devint le perroquet de clavicule du redoutable Pitt-Haines. À bord du Grappin, il assista aux féroces abordages qui enrichirent le monstrueux pirate. Quand Pitt-Haines décida d’enterrer son trésor, le perroquet Coco fut le seul à connaître par cœur le trajet diablement compliqué menant à la cachette. Même son maître s’y perdit, c’est dire qu’il comptait sur Coco pour le retrouver le moment venu. Mais le perroquet choisit de se carapater : “En ces jolis temps, donc, la cervelle pleine du cadastre de mes responsabilités, je la perdis en m’amourachant d’une Mainate et, l’amour étant ce qu’il est, je désertai, emportant dans mon cerveau le plan vu du ciel […] et dans mon cœur toutes les espérances de bonheur.” Coco rejoignit la mainate Nath, tandis que Pitt-Haines se mit à le traquer dans tous les bouges. Car c’est bien une maison à lanterne, un boxon, qui abrita un temps les amours et les bécots de Nath et Coco. Croire que l’obstiné pirate ne le retrouverait point, quelle erreur. Pitt-Haines livra vite la pauvre Nath à quelque autre bordel, il s’en trouvait quantités en ces temps-là. Surtout, il fit subir les plus immondes tortures à Coco, afin que le perroquet lui rappelle le secret de la cachette du trésor. Mais les aventures du volatile parleur ne s’arrêtèrent certes pas là, que non. Plus tard, ayant subi une maladroite trépanation mal recousue, ça permit à Coco de gagner à nouveau sa liberté. Grâce à son ami le faucon La Berlue, il faut le préciser. Un peu de répit leur sera offert par le pirate maure mahométan Nardine Hateur, sans que Coco oublie sa mission, délivrer la pauvre Nath, son amour de mainate… Il n’est pas normal que la plupart des contes s’adressent aux enfants ou aux ados, pénalisant les adultes. Pourquoi notre imaginaire serait-il moins riche que celui des mômes ? Heureusement, A.H.Benotman remédie à cette criante injustice. C’est une histoire hilarante qu’il nous narre à travers les souvenirs de son héros Coco, un conte ironique aux péripéties désopilantes. Un texte extrêmement bien écrit, il est bon de le souligner. Le résumé ci-dessus n’en est que le modeste survol, c’est le cas de le dire. La crudité des aventures en question ne s’adresse pas aux enfants de chœur, s’il en reste. D’autant qu’il s’agit d’un livre illustré, et c’est là qu’on se régale doublement. Car si l’on connaît le talent de romancière de Laurence Biberfeld, on s’aperçoit que c’est également une illustratrice inspirée. Ceux qui aiment les caricatures dans le style de Dubout ne peuvent qu’adorer. Encore qu’il y ait une véritable touche personnelle dans ces dessins, complétant à merveille le texte de Benotman. Publiant peu, avec une exigence de qualité, les éditions Écorce nous présentent un très bel ouvrage qui mérite d’être apprécié par un large public. |