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FRANCOIS BARCELO |
CadavresAux éditions FOLIO POLICIER GALLIMARD |
1406Lectures depuisLe vendredi 15 Juillet 2011
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Une lecture de |
Au Québec, Raymond Marchildon vit à Saint-Nazaire-de-Mainville, du côté de Saint-Barnabé. Âgé de trente-trois ans, il habite dans ce village perdu avec sa mère. Leur vieille maison n’a plus le téléphone, depuis qu’ils ne paient plus les factures, ni guère d’autres commodités. Raymond se déplace dans une Hyundai Pony bien fatiguée. Tous les deux vivent de l’aide sociale, en trichant tant qu’ils peuvent. Il est vrai qu’elle n’est pas exemplaire, la mère de Raymond. “Avec un minimum de soins, maman aurait été une publicité parfaite pour vanter les vertus de tous les abus : «Buvez, fumez, baisez n’importe comment, ne faites jamais d’exercice, mangez n’importe quoi, et vous aurez l’air de ça à cet âge-là.» Je l’ai souvent imaginée dans un panneau réclame conjoint des fabricants de cigarettes, d’alcool, de sièges inclinables et de fast-food.” Excessive en tous les domaines, la mère de Raymond eut même plusieurs pères à lui proposer. Raymond n’a jamais fait aucun effort d’insertion sociale. “Je n’ai jamais travaillé un jour de ma vie. Même si on m’a offert des petits jobs au noir. Mais je ne suis pas sûr que j’aurais accepté un bon job payant. Pourquoi faire ? Sans travailler, je n’ai jamais manqué de rien. Les quelques blondes que j’ai eu, quand j’étais jeune, je les ai laissées travailler à ma place, je leur ai pris tout l’argent que j’ai pu, le temps qu’elles ont bien voulu.” Avec sa mère, il ont bien cultivé un peu de marijuana, mais c’est vite devenu dangereux, et pis ils avaient leur stock. Sinon, ils ont beaucoup forcé sur la mauvaise bière. Un peu à cause de la boisson qu’elle est morte, la mère, mais surtout à cause d’une balle en pleine face. En ce 31 décembre, Raymond ne sait trop quoi faire. Il a roulé dans sa Pony, mais il est fauché pour se payer l’essence. Alors, il téléphone à sa sœur Angèle. Comédienne pour la télé, elle est connue sous le nom d’Angèle Pontbriand. Elle joue le rôle de la détective Mariette Davoine dans la série “Cadavres”. Ce qu’on lui demande surtout, c’est de se montrer sexy, car elle est vraiment bien roulée. Angèle rejoint son frère Raymond, qu’elle n’a plus vu depuis dix ans. Mais ils ne retrouvent pas le corps de leur mère. À la place, ils s’aperçoivent au matin du premier janvier qu’il y a un cadavre d’homme dans un fossé. Angèle et Raymond ne voient pas l’utilité d’appeler la police. D’autant qu’il y a aussi un squelette dans la cave de la maison, enterré depuis longtemps. Trois cadavres, dur à expliquer ça aux policiers. D’autant qu’Angèle a d’autres soucis. Elle risque de perdre son rôle à la télé, et son boy-friend impliqué dans un trafic l’a arnaqué de la caution. La jeune femme décide de rester vivre avec son frère. Raymond accapare la BMW (en location) de sa sœur. Il tente de franchir la frontière avec les Etats-Unis, mais il est plusieurs fois refoulé. Puis il roule vers l’ouest du Canada. Finalement, il préfère rentrer à Saint-Nazaire, se promettant de mieux se comporter. Mais un couple, Paulot et Paulette, vient réclamer le corps de l’homme du fossé, que Raymond a enterré à la cave. C’est surtout la drogue qu’il transportait qui les intéressent. En échange, le couple laisse chez Angèle et Raymond le cadavre d’une femme. Embarrassant, mais il y a de la place dans la cave, et ce n’est pas le dernier cadavre dont-ils vont hériter… C’est une excellente comédie noire que concocta François Barcelo en 1998 avec ce “Cadavres”, réédité chez Folio depuis 2002. Un roman savoureux, jubilatoire. Tout y est parfaitement amoral, à commencer par le narrateur Raymond. Un brave garçon, qui n’a que des défauts et des vices, c’est délicieux. Pas tellement plus brillants, sa sœur et tous les autres protagonistes n’échappent pas à la caricature très réussie qu’on fait d’eux. “Il fait un temps de cochon pour un premier janvier. On a deux autos qui marchent pas. Maman est morte. Mais j’ai retrouvé ma sœur que j’avais pas vu depuis dix ans. Puis elle est encore plus belle que la dernière fois que je l’ai vue. Je vois pas pourquoi je sourirais pas.” L’auteur était déjà très expérimenté, ayant de nombreux livres à son actif avant d’être le premier Québécois à publier dans la Série Noire. Ceci explique la maîtrise de cette intrigue sans temps morts, plutôt délirante. Un pur bonheur de lecture que ce roman noir plein de fantaisie ! |
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