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PASCAL BASSET-CHERCOT |
Toine, Mémoires D'un Enfant LaidAux éditions CALMANN-LEVY SUSPENSEVisitez leur site |
947Lectures depuisLe mercredi 3 Mai 2017
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Une lecture de |
Parution avril 1994. 194 pages. 18,20€. Version numérique 9,99€. Bon anniversaire à Pascal Basset-Chercot né le 1er avril 1956. Et ce n'est pas un poisson ! Toine est un enfant très laid, tout aux moins aux yeux des autres. Personne ne l’aime, tout le monde le rejette. A l’école, il est la risée de la classe et des professeurs. Seul Paulus lui offre son amitié, et encore. Mais Paulus lui aussi est rejeté parce que trop gros, trop gourmand. Toine n’a pas de père, et sa mère ne peut le souffrir. Elle préfère fricoter avec les hommes et boire un coup de rouge avec son amant en titre, Patrice. Avant, c’était Jean-Claude. Il était gentil, mais il a déserté la maison pendant que maman était à l’hôpital, enceinte d’Anne. Anne, la petite sœur, la seule qui aimait Toine, la seule qui jouait avec lui. Anne maintenant est morte. Toine n’est pas malheureux, il subit. Il n’aime pas être enfermé dans le noir et, lorsque Patrice le consigne dans le placard, il attend stoïquement. Pauvre Toine qui ne sait pas ce que ce sont l’amour, la haine, la justice, la révolte. Et, dans son placard, Toine revit sa jeunesse. Le cerveau de Toine, c’est comme une casserole dans laquelle les souvenirs remontent à la surface, à gros bouillons. Les bulles crèvent, un souvenir s’en échappe, accrochant un autre souvenir au passage. Et chaque bulle renferme un personnage : grand-mère qui se lavait morceau par morceau, Anne qui dansait les bras en cerceau, Joseph le clochard qui chantait des chansons de marin, et Coulant l’ancien musico, et Paulus son ami qui, un jour, chronométra sa noyade et sa mère qui ne veut pas le reconnaître dans la rue. Et Patrice, qui l’a surnommé Bus parce que Toine est trop laid. Lorsque Patrice le libère enfin de son placard, Toine meurtri se réfugie dans une cave de l’immeuble. La nuit tombée, il part, guidé par la lune. Il est recueilli dans un orphelinat. Un docteur et une psychologue tentent une réadaptation, en lui faisant consigner ses souvenirs dans un cahier, en lui apprenant à jouer du piano. Mais Toine vit avec Bella, une poupée, et une pensée qui l’obsède, celle de rejoindre un jour Anne.
Les images défilent, et l’on voudrait protéger ce petit garçon martyr qui se contente de jeter sur le monde un regard naïf, étonné, supportant dans l’indifférence la douleur. Un véritable roman noir, émouvant, écrit avec simplicité. Toine ne pleure pas sur son sort, il le subit. Il n’a aucun désir de revanche, seulement celui de retrouver sa sœur Anne. Un livre étonnant, dur et beau à la fois, dans un registre totalement différent de ce que Pascal Basset-Chercot avait abordé dans ses romans policiers ayant l’inspecteur Déveure pour héros. Quoique, comme le faisait remarquer Jean-Paul Schweighaeuser: Les missions confiées à l’inspecteur Déveure ont toujours un petit aspect de brimade. Ici, il ne s’agit plus de brimades, mais de tortures physiques et morales. Et l’on se prend à réfléchir à ce petit mot situé entre le nom de l’auteur et celui de l’éditeur : « roman ». S’il n’y a pas une seule parcelle de vérité ou de souvenir dans ces pages, c’est que Pascal Basset-Chercot est un sacré écrivain. |