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BARBARA ABEL |
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1573Lectures depuisLe mardi 19 Decembre 2017
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Une lecture de |
À l’école maternelle des Pinsons, la jeune Mylène Gilmont n’est pas la plus expérimentée des institutrices. Âgée de vingt-six ans, elle n’attire que modérément la sympathie. Elle préfère ne pas dire qu’elle est insulino-dépendante, pour ne rien compliquer. Ce vendredi, une sortie scolaire est programmée. Les animations se passent plutôt bien. Mais dans le groupe dont est responsable Mylène, la petite Emma se montre exagérément grincheuse. Si elle ne cède pas vraiment aux caprices de cette enfant de cinq ans, l’institutrice ne se sent guère soutenue par ses collègues. À la fin de la journée, avant le retour, Emma a disparu. Mylène la cherche dans la forêt d’à côté. Tombée dans un trou, la fillette est bloquée dans une galerie. L’institutrice finit par y être prisonnière elle-même, perdant tout contact avec l’extérieur. Elle parvient à extirper Emma, mais reste seule dans la galerie. Emma est la fille de Camille Verdier, trente-et-un ans, et de Patrick Verdier, professeur en faculté. Ce dernier est un homme strict, au caractère quelque peu ombrageux. Le couple semble sans histoire. Indépendante sur le plan professionnel, Camille a un secret. Depuis plusieurs semaines, elle est devenue l’amante d’Étienne. Cuisinier dans une brasserie, plus âgé qu’elle, il possède une prestance qui a séduit la jeune femme. Camille évite d’analyser cette passion amoureuse, même si Étienne s’avère plus envahissant qu’il ne faudrait, par rapport à sa vie familiale. Quand Emma disparaît lors de la sortie scolaire, ses parents en sont vite avertis et se rendent sur les lieux. Heureusement, la petite est bientôt retrouvée. Malgré tout, Patrick Verdier se montre furieux, vindicatif. Sur place, le capitaine de police Dupuis s’aperçoit qu’Emma a forcément été en contact avec Mylène il y a peu de temps. Toutefois, l’enfant n’aide pas du tout les enquêteurs. “Je sais pas”, répond-elle quand il est question de Mylène. Impossible de définir si la disparition de l’institutrice est volontaire ou non. Les témoignages des autres enseignants sont assez accusateurs envers elle, oubliant qu’Emma est une peste. Après être rentrés chez eux, Camille voudrait échanger seule avec sa fille, mais la présence de Patrick pose problème. Et peut-être Emma est-elle effectivement en état de choc ? Le père de Mylène a été joint par la police. Diabétique lui aussi, il mesure le danger si sa fille est en manque d’insuline. Pourtant, ce n’est pas après la tombée de la nuit qu’il peut espérer la retrouver dans la forêt, si elle s’y trouve. Dupuis apprend que le père de Mylène a un casier judiciaire chargé, même si les faits remontent à longtemps. Ça ne le rend pas suspect, mais ça ne clarifie rien non plus. Le lendemain samedi, la tension monte chez les Verdier. Pour Camille, il n’est pas simple d’amadouer Emma, tandis que son mari est plus ferme que jamais. Le père de Mylène n’est pas de ceux qui font confiance à la police. Dupuis ménage peut-être trop les Verdier, maîtrisant mal l’enquête. Quant à Mylène, il faudrait un miracle pour la sauver… (Extrait) “L’institutrice peine à calmer son ressentiment. Pendant quelques minutes, elle trépigne sur place, empoigne des feuilles de fougère qu’elle déchiquette avec rage, expulse un chapelet de plaintes rauques chargées de haine et d’aversion. Puis, haletante et accablée, elle tente de reprendre possession de ses moyens. Refoule un dernier sanglot de fureur. Se ressaisit à gestes maladroits, lisse sa jupe, remet son chemisier en place, rattache quelques mèches rebelles. Ça suffit comme ça. Elle retourne au car. De toutes façons, c’est peine perdue. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin. Si la gamine reste introuvable, c’est aux autorités compétentes de la localiser. Qu’importe ce que dira cet imbécile de Danzig, elle n’est ni à ses ordres, ni à ceux de qui que ce soit ici. Autour d’elle, la végétation bruisse dans un frisson menaçant. En levant la tête, Mylène constate la présence de nuages gris qui envahissent peu à peu le ciel. Le temps se gâte.” Le thème des disparitions de personnes est souvent exploité dans la littérature policière, sans doute parce qu’il se rapproche de la réalité. Accident, enlèvement, suicide, mauvais concours de circonstances ou même acte volontaire, rien ne doit être exclu dans ce type d’affaires. Mais l’excellente Barbara Abel ne confond pas la fiction avec les faits divers. Ce n’est pas un roman d’enquête qu’elle nous propose. C’est un habile amalgame entre le suspense, l’action et la psychologie. À l’inverse de ces auteurs qui alourdissent le récit avec des considérations obscures sur le cheminement psychologique des protagonistes, Barbara Abel illustre cet aspect de façon finement nuancée. Par exemple, si le couple Verdier couve une crise, on en perçoit les raisons profondes grâce certains détails. On comprend rapidement qu’ici, personne n’est innocent. Même pas la petite Emma, qui n’a pas un profil de "victime". S’ils sont sûrement compétents, les enseignants ne font guère preuve de solidarité vis-à-vis de Mylène, leur collègue. Afficher une supériorité de façon mordante, ce n’est pas véritablement une preuve d’intelligence chez l’universitaire Patrick. Quant à Camille, elle est empêtrée dans une situation très complexe, surtout au niveau des sentiments qu’elle éprouve. De son côté, le père de Mylène se sent isolé face à la disparition de sa fille. Par son écriture raffinée, Barbara Abel dessine des portraits tels des fusains où l’emportent les teintes grises frisant parfois le noir. Délicieuses intrigues, énigmatiques et animées, dans lesquelles on se sent entraînés, car c’est avec maestria qu’elles sont concoctées par cette talentueuse romancière. |
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