Une lecture de JULIEN VEDRENNEWarnauts et Raives sont de vieux complices qui aiment à nous emmener en Afrique. Duo atypique qui pratique le dessin à quatre mains, l’ancien Congo belge reste leur terrain de prédilection. La déchéance des colons occidentaux est leur trame de fond. Congo 40 était ainsi. Fleurs d’ébène n’échappe pas à cette règle.
Jean est fonctionnaire de police. Il dit aimer cette terre qu’il foule et vouloir y rester après sa retraite. Son mariage a été raté. Sa femme et ses filles sont parties vivre à Brazza. Lui se perd entre les bras de négresses. Et voilà qu’un Africain est retrouvé mort, écrasé, sur une route quasi déserte. Bien entendu, les acteurs de ce drame n’ont pas demandé leur reste. L’histoire se corse lorsqu’on se rend compte qu’il s’agit d’un activiste issu d’une des deux ethnies dominantes d’un Congo belge aux portes de l’indépendance. D’autant que les témoins, preuves et autre procès verbal disparaissent mystérieusement. Jean est un entêté qui préfère se perdre dans son travail, l’alcool et la chasse au buffle plutôt que de se poser des questions. Et puis il y a Judith, une belle Africaine dont il est éperdument amoureux, mais qu’il a honteusement bafouée. Une colère sourde gronde en lui. Bruxelles souhaite son retour. Jean s’enferme encore plus. Pour lui, la résolution de l’enquête sera sa rédemption.
Le trait est précis. Les couleurs sont très belles et nous font agréablement voyager dans ce Congo extraordinaire au paysage époustouflant. On visite le zoo en même temps que Jean et ses enfants, et on s’arrête devant les mêmes animaux avec l’envie de les caresser. Et puis il y a ce désespoir qui ne s’essaie même pas à être latent et qui est commun à tout le monde, ou presque. Fleurs d’ébène est une tragique histoire policière, une belle histoire tout court, teintée d’humanisme.
Éric Warnauts (scénario et dessin) & Raives (mise en couleurs et dessin), Fleurs d’ébène, Casterman, janvier 2007, 64 p. – 13,75 €.
JULIEN VEDRENNE |

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