Une lecture de JEANNE DESAUBRYRivages Noir / Casterman / 2013 Dieu sait que j’ai pour l’œuvre de James Ellroy –du moins jusqu’aux années 2000 – une vénération totale. Et par ailleurs,on ne peut guère me soupçonner de me vautrer dans la flagornerie. Mais, lecteur attentif, même sans être spécialiste du monde noir, tu auras compris que le rapprochement – Ellroy - BD est une promesse de voyage inconnu et hasardeux. Il fallait y ajouter la caution de Guérif pour s’assurer de la qualité. L’univers que décline Hyman est parfait ; loin du brillant d’un film de de Palma (il vaut sans doute mieux, d’ailleurs, malgré la sexyssime Scarlett Johansson) le fumé subtil, les couleurs un peu éteintes, les ombres marquées renvoient aux films des années cinquante, période de l’enquête sur « l’affaire du Dahlia noir », le meurtre d’Elizabeth Short. Le découpage (du livre, on ne ricane pas ! ) se fait par périodes, les différentes parties de l’album se centrant tour à tour sur les personnages pivots de l’intrigue que, lecteur de polars, tu connais forcément bien.Enfin, cerise sur le gâteau, la BD existe en deux versions, comprenant la « luxe » qui représente un cadeau parfait (à offrir ou à recevoir). Si j’avais un conseil pour le martien qui découvrirait la noire nuit terrienne et qui n’aurait jamais lu un polar : il faut (re) lire « Le Dahlia Noir », le roman, le vrai, puis retourner aux sources biographiques de James Ellroy avec « Ma Part d’Ombre » et enfin, plonger dans la BD. Un condensé d'humanité déchirée. La même expérience transformera un terrien aguerri en somnambule déboussolé. La dernière page tournée, il pourra retourner dans sa vie. La sienne, la nôtre, qu’il vaut peut-être mieux nous souhaiter insipide et paisible.
JEANNE DESAUBRY |
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