Une lecture de CLAUDE LE NOCHERDébut 1954, Jacques Gipar est reporter pour le magazine France Enquêtes. Dans sa Simca Aronde flambant neuve, il prend la direction de la Somme, embarquant avec lui son jeune complice Petit Breton. À Albert, le représentant de commerce Robert Lacure a été abattu au volant de sa 4CV, alors qu’il se garait devant l’Hôtel des Alliés. C’était un bon client de cet établissement, toujours courtois, souvent accompagné d’une dame. Tandis que Petit Breton retrouve une grosse boucle d’oreille sur le lieu du crime, Jacques Gipard ne tarde pas à identifie la maîtresse de Robert Lacure. C’est la belle Léa Delachaux, l’épouse du notaire de Château-Vieux, plus jeune que son mari. Gipar et Petit Breton se rendent dans cette petite ville située à une dizaine de kilomètres. Ils y font la connaissance de Georges Duteil, journaliste à La Dépêche Picarde, âgé d’une vingtaine d’années. Admirateur du reporter parisien, Duteil accompagne volontiers le duo. Le lendemain, on apprend que le notaire Delachaux a été assassiné devant chez lui, abattu d’une balle en pleine tête. Une tentative de cambriolage ayant mal tourné? Petit Breton n’y croit guère. C’est l’inspecteur Général (tel est son patronyme) de la police lilloise qui est chargé d’enquêter. Il ne tarde pas à boucler l’affaire, en arrêtant un gitan nommé Manolo. La boucle d’oreille semble bien lui appartenir, en effet. Le policier ne fait pas le lien avec la mort de Robert Lacure, semble-t-il. Peu après, c’est le clerc de notaire de Maître Delachaux qui disparaît à son tour. Rémy Gloudot avait passé la soirée avec les journalistes. Ceux-ci reconstituent son parcours pour rentrer chez le notaire, et découvrent bientôt son cadavre. Trois morts dans la Somme, voilà de quoi attirer la presse nationale. Jacques Gipar a une longueur d’avance, étant devenu intime avec Odette, l’employée de maison des Delachaux. Tandis que le policier Général s’acharne sur les camps de gitans, Gipar s’interroge sur Jean-Michel Cachin, demi-frère de Mme Delachaux. Un monsieur déplaisant, c’est certain. Le reporter et Petit Breton prennent sous leur protection Gino, le jeune fils de Manolo. Un témoin qui aura son importance. La collection Calandre des éditions Paquet a pour thème l’automobile. En 2011, on avait déjà pu y apprécier “Le retour des capucins”, une enquête de Jacques Gipar très réussie. Cette série joue largement sur la nostalgie, y compris pour le graphisme. Le dessin nous rappelle les grandes heures de la bédé franco-belge, des années 1960-70. La France d’alors est plutôt bien évoquée, avec ses décors typiques, des petites villes traditionnelles, et ses véhicules caractéristiques. Par exemple, si les camions actuels sont puissants, les “bahuts” sillonnant autrefois les routes étaient des engins diablement résistants. La voiture-star de cet épisode, c’est la Simca Aronde “Grand Large” du reporter, modèle qui connut un très beau succès commercial, en effet. Si le dessin de Jean-Luc Delvaux est fort séduisant, le scénario de Thierry Dubois est tout autant à la hauteur. Car c’est une authentique intrigue policière qu’il nous a concocté. Crimes énigmatiques et courses poursuites sont au programme, dans cette solide histoire. Une bédé qui renoue avec la meilleure tradition.
CLAUDE LE NOCHER |
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