Le Chat De L'empereur une nouvelle de Jean-Claude Renoux


Le Chat De L'empereur

par

JEAN-CLAUDE RENOUX

C’était en un temps où nul homme n’avait le droit de séjourner dans le palais de l’empereur à nuit tombée, hormis l’empereur lui-même, les eunuques, et les femmes, épouses, concubines, odalisques ou servantes…

En ce temps-là il y avait un jeune étudiant nommé Thui qui vivait dans la capitale et cet étudiant préférait la débauche à l’étude. Un soir où Thui avait bu plus que d’ordinaire il jura qu’il passerait toute une nuit dans le palais de l’empereur, et la vantardise fit le tour de la ville, pour parvenir enfin aux oreilles de l’empereur qui éclata de rire et dit que si l’étudiant Thui parvenait à passer toute une nuit dans le palais, lui, l’empereur, promettait de se faire eunuque après lui avoir fait couper la tête.

Or donc une nuit, Thui fut réveillé par un fantôme :
- Garçon, dit le fantôme, figure-toi que j’étais un haut fonctionnaire de la cour et que l’empereur d’humeur badine a eu la mauvaise idée de me faire couper la tête après que l’on m’eut fait subir le supplice du dépeçage. Aussi je ne serais pas mécontent de lui voir perdre ses précieuses. Je vais t’indiquer un petit bois non loin de la capitale où poussent des roseaux dorés. Que tu brûles ces roseaux et que tu t’enduises de leurs cendres et tu deviendras invisible. Il te sera ensuite facile de rentrer dans le palais, et de raconter ensuite quelle robe l’empereur portait cette nuit-là pour qu’il se sente obligé de tenir sa promesse !
 
Au matin Thui se rendit dans le petit bois. Là il y avait une source d’eau pure où nageaient des petits poissons d’or et dans les roseaux environnants gazouillaient des petits oiseaux d’argent. Thui fit brûler les roseaux, s’enduisit un doigt de cendre : le doigt disparut pour réapparaître une fois lavé dans l’eau de la source. Thui revint à la capitale avec un sac rempli de cendre, et l’après-midi même après s’être entièrement dévêtu il se recouvrit de cendres et traversa ainsi la ville, nu comme un ver sans que personne ne le vît, s’introduisit dans le palais et se promena dans les jardins en attendant la fermeture des portes. Thui gagna ensuite la chambre de l’empereur, et après avoir bien observé la robe de l’empereur il sortit faire quelques pas dans le jardin en attendant l’ouverture des portes…

Thui n’avait pas pensé que la rosée pourrait délaver la cendre !

Si bien qu’aux premières lueurs du jour on découvrit un homme nu errant dans les jardins. Quel émoi ! On courut appeler l’empereur qui était aussi blême que Thui : l’un se voyait perdre ses précieuses, et l’autre la tête !

C’est alors qu’une idée vint à Thui : il se mit à quatre pattes et se mit à miauler ! Aussitôt l’empereur dit :

- C’est un chat !

Et comme personne n’osait contredire l’empereur, on acquiesça !
- D’ailleurs je vais m’en assurer par moi-même, dit l’empereur !
Il s’approcha de Thui et le gratta derrière la tête tout en lui glissant dans l’oreille :

- Sais-tu que je pourrais te faire castrer, le chat ?

Et Thui ronronna :

- Sais-tu que je pourrais dire que je suis un homme et que tu le serais aussi, mon maître ?

L’empereur se redressa vivement :

- C’est bien un chat !

Voulant l’humilier tout en gardant ses précieuses, il ajouta aussitôt :

- Qu’on lui donne du lait, du poisson cru, et des souris, et qu’on reconduise ce chat dans sa demeure. Et pour qu’il ne lui arrive rien en route j’ordonne que dix hommes d’armes ouvrent la marche et que dix autres marchent derrière.


Et c’est ainsi que Thui dut avaler de bon matin du lait, du poisson cru et des souris, qu’il dut traverser la ville à quatre pattes, dix hommes d’armes par devant, dix hommes d’armes par derrière, tout en miaulant et nu comme un ver.

Un héraut criait à tue–tête :
- Faites place au chat de l’empereur, faites place au chat de l’empereur !

Thui resta cloitré tout le restant de la journée, de crainte des tueurs que l'empereur ne manquerait pas de dépêcher pour qu'il ne parle point. À nuit tombée il s'enduisit de cendres et disparut.
Et comme il connaissait l'existence du petit bois aux roseaux dorés, il ne connut jamais la faim et à défaut d'être bachelier devint le prince des voleurs.

Quant à savoir s'il s'introduisit de nouveau de nuit dans le palais de l'empereur, aucune femme, concubine, odalisque, ni même la moindre servante ne s'en est jamais vanté !

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