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Petits Braquages Entre Amis |
Joseph est charpentier. Sa femme, Marie, attend un enfant : un garçon. "Comment allons-nous l'appeler ? Pourquoi pas Emile-Louis ?" Ainsi fut fait. (Pour la petite histoire, Emile-Louis naquit à Auxerre, délicieuse cité de l'Yonne.) A 18 ans, il a quitté sa province, le cœur léger et le bagage mince, avec un CAP de tailleur de pierres en poche. Et a débarqué à Belleville. LE GANG DES POILUS Son bagage est mince, certes, mais lourd : il trimbale dans sa sacoche un marteau et un burin. Et il va intéresser par sa dextérité, quelques petits gars du quartier : une bande de cinq copains qui se connaissent depuis l'enfance. Très joueurs, ils adorent se déguiser, surtout pour attaquer des banques. Moustachus, barbus, perruqués, on les a baptisés le "gang des poilus". Rien à voir avec 14-18. De vrais zouaves, ils s'affublent de surnoms capillaires : Big moustache, Landru, Louis XVI… (Ils ne manquent ni d'humour, ni de culture.) 8 secondes pour ouvrir un coffre, aidé d'un marteau et d'un burin : c'est la hold-up attitude ; deux casses dans la même journée, 3500 coffres forcés en trois ans et ça vire au braquage circus. Ils raflent tout : le cash, l'or, les bijoux. Leur fourgue, Dédé la Joncaille, écoule le surplus. Notre équipée sauvage affectionne aussi les "tirelires" : les fourgons bancaires. On dit d'eux qu'ils roulent tous en BMW, un rêve de gosse. Leur groupe est très soudé, aucune balance. Une devise simple : pas de sang, pas de violence, on prend l'oseille et on se tire. A la Spaggiari, leur modèle. Mais le dernier braquage dégénère : un employé a voulu jouer les héros. Prise d'otages dans la banque, la Brigade (pas légère) de la Répression du Banditisme accourt et avec elle, les gars du GIGN : une dizaine de Dark Vador bouchant toutes les issues. Nos tontons flingués se rendent, l'équipe est coffrée. L'ETAPE ZONZON Emile-Louis est solidaire et lors du "rien que toi, moi, nous", l'interrogatoire par un flic, il reconnaît les faits, mais ne dénonce personne. Les lendemains déchantent certes, toutefois, il n'a aucun regret, (non, rien de rien, non, il ne regrette rien) il en a profité largement. Ils sont tous envoyés à Fleury, en attendant leur jugement. Leur avocat, Maître Labranche (sur un arbre perché) est lui-même un ancien braqueur. Il comprend donc leur motivation, mais son plaidoyer n'est pas convaincant. Les peines sont lourdes. Emile-Louis partage quelques temps sa cellule avec un certain Maurice Batignol, un gars sympa, avec qui il va se faire la belle. Hors de question pour notre "poilu" de tirer 10 ans dans cette taule. Il considère l'évasion comme un devoir et va la pratiquer six fois. D'où son nouveau surnom : l'anguille. En fait, le gang n'a pas été entièrement démantelé et les prisonniers bénéficient de l'aide financière et matérielle de leurs complices, à l'extérieur. La dernière escapade d'Emile-Louis est spectaculaire, elle s'effectue par hélicoptère, "à la Française". Il va rester en cavale quelques années, bien planqué. (Il est tout simplement retourné chez lui, à Auxerre, d'où son dernier sobriquet : le disparu de l'Yonne…) |
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