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ENTRETIENS DE MUSICIENS PAR LES LYCEENS DE SECTEUR JAZZ |
Banlieues Bleues : Tables D’écouteAux éditions EDITIONS LE MOT ET LE RESTE |
317Lectures depuisLe vendredi 26 Fevrier 2010 |
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Une lecture de |
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Préface de François BON. La musique, c’est comme un arc-en-ciel, et le jazz pourrait correspondre à la couleur Bleue. Bleue comme la fameuse note, évidemment, bleue comme le Blues, bleue comme la mer synonyme d’évasion, ou de traversées tragiques de l’Afrique vers les Caraïbes, bleue comme les Banlieues et toutes les désinences possibles. Du bleu pastel au bleu noir, le jazz se décline de toutes les nuances sur la palette et chacun peut y trouver son compte. Comme les lycéens de la Seine Saint-Denis qui se sont prêtés avec un plaisir certain et un sérieux de professionnels au petit jeu des questions avec les musiciens qui animent les soirées du festival de jazz des Banlieues Bleues. J’en profite pour signaler que le festival des Banlieues Bleues, le 27ème du nom, se tiendra cette année du 12 mars au 16 avril de cette année dans divers sites de la Seine-Saint-Denis dont Pantin, Le Blanc-Mesnil, Bobigny, La Courneuve, Stains, Les Pavillons-sous-Bois et quelques autres, le programme étant disponible sur www.banlieuesbleues.org . Tables d’écoute reprend quelques unes de ces interventions avec des lycéens et qui se sont déroulées entre 2001 et 2009 dans les coulisses des salles de concert. Le guitariste Marc Ribot déclare à l’issue d’une séance qui s’est déroulée le 7 mars 2009 : « Vous avez vraiment de très bonnes questions, bien meilleures que celles de la plupart des journalistes ». Et à questions pointues, réponses graves. Comme si les musiciens s’épanchaient devant des psychanalystes en herbe. Mais ces interrogations ne portent que sur la musique et ses satellites. Ainsi Jason Moran avoue que pratiquant le piano depuis l’âge de six ans sans réel plaisir il trouvera sa voie en entendant à quatorze ans un morceau exécuté par Thelonius Monk en accompagnement d’un reportage télévisé, en réponse à cette question « En quoi différez-vous de Thelonius Monk ? » Question suivante : « Selon vous la modernité peut-elle changer la tradition ? ». Autre exemple pris au hasard de la lecture, le parallèle effectué par Jack Dejohnette entre un boxeur et un batteur en répondant à cette question : « Quelle est pour vous la connexion entre la boxe et le jazz ? Est-ce que les interactions dans un groupe de musique vous demandent de développer la même réactivité que dans la boxe ? ». Et tous ces musiciens, qu’ils s’appellent Lafayette Gilchrist, Martial Solal et Dave Douglas, Jack Dejohnette, Médéric Collignon, Louis Sclavis, Bernard Lubat et bien d’autres jouent de la parole comme de leurs instruments. En tout cinquante huit participants. Certains vont même à pousser le jeu à devenir de questionnés questionneurs comme Cooper-Moore. Dans certains entretiens comme celui de Milford Graves, les questions ont été gommées pour laisser place à un article cohérent et passionnant. Ces entretiens ont été préparés en classe, mais il s’en dégage une spontanéité, un enthousiasme, un sérieux qui laissent augurer un investissement réel et profond de ces jeunes lycéens. Et ces moments de connivence resteront surement marqués, gravés durant de longues années dans leur mémoire et peut-être que de futurs talents, de futurs musiciens de jazz se révéleront au contact de leurs ainés. Et qu’ils garderont de ces journées, enfoui au fond de leur cœur et de leurs oreilles, un coin de ciel bleu propice à dissiper la morosité ambiante que vivent les jeunes du 9.3 dans un département trop souvent décrié, trop souvent montré comme un nid de casseurs, de dealers et autres anathèmes qui ne concernent qu’une toute petit minorité de la population trop facilement pointée du doigt pour cacher des lacunes sociales. Compléments indispensables, les nombreuses photos qui accompagnent cet ouvrage, ainsi qu’un index des divers intervenants. PAUL MAUGENDRE |