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Archives Polar-Jazz |
 Jazz et polar, c’est l’histoire d’une rencontre programmée. Les deux genres ont longtemps été marginalisés. Le jazz, dès ses origines, fut considéré par les tenants d’un savoir musical supposé académique comme une musique peu sérieuse, voir scandaleuse. De son côté, le polar fut longtemps assimilé à une sous-littérature de « mauvais genre ». Jazz et polar sont nés dans (et de) la violence et la révolte. D’après Ronald L. Morris (Le jazz et les gangsters), le jazz n’aurait peut-être pas connu un tel essor sans le « mécénat » et la protection des truands. Cette thèse a été très contestée, mais il est certain que les jazzmen ont longtemps côtoyé le monde du crime, de la drogue et des combines en tous genres. Le célèbre Cotton Club, par exemple, avait été créé en 1923 par le gangster Owney Madden dans le but d’écouler sa bière, son alcool de contrebande et certainement de blanchir l’argent d’autre activités.  Juste retours des choses : il existe des centaines de polars (romans, films, bédés, pièces de théâtre, etc.) dont l’action sur déroule sur fond de jazz. Plusieurs polars ont même choisi comme cadre le mystique Cotton Club. Mais le jazz a rencontré la littérature bien avant la naissance du polar. On pourra lire sur le sujet les ouvrages suivants : Jazz sur livres (Philippe Fréchet, Maison du livre et des écrivains de Montpellier), Jazz et littérature (Collectif, Les cahiers du jazz N°4, 1994), Jazz et littérature (Collectif, Revue Europe N°820-821, août-septembre 1997), Jazz et littérature (Collectif, Revue Atlantiques N°111, automne 1997). Et surtout, les œuvres de : James Baldwin, Jean Cocteau, Julio Cortazar, Alain Gerber, Allen Ginsbert, Herman Hesse, Max Jacob, Leroi Jones, Jack Kerouac, Michel Leiris, Henri Miller, Walter Mosley, Marc-Edouard Nabe, Raymond Radiguet, Jean-Paul Sartre, Quincy Troupe, Tristan Tzara, etc.  On peut distinguer deux grands types de « polars-jazz ». Les premiers utilisent le jazz comme fond sonore, contribuant à créer une ambiance et un climat propice au développement de l’histoire. Dans ces polars, le héros est souvent un fan de jazz et ses goûts musicaux reflètent généralement ceux de l’auteur. C'est le cas par exemple de Dernière Station avant autoroute de Hugues Pagan.  Dans la deuxième catégorie, le jazz est intimement lié à l’intrigue. Les protagonistes peuvent être jazzmen ou propriétaires de clubs. C'est le cas pour L’ange du jazz de Paul Pines. Entre ces deux grandes familles, il existe toutes les combinaisons possibles. Parfois, le jazz ne fait que passer. D’autres fois, il fait partie d’une palette plus larges de musiques, en fonction de l’éclectisme des protagonistes... et de l’auteur. C’est le cas pour la plupart des recueils de nouvelles, comme La musique adoucit les meurtres de Noël Balen.  Dans tous les cas, le jazz contribue à donner une tonalité noire au polar qu’il hante. Les polars-jazz sont riches d’enseignement. Certains d’entre eux n’échappent pas aux poncifs du genre (musiciens torturés et incompris, chanteuses aux mœurs dissolues sous l’emprise conjuguée de la drogue et du gangster de service, impresarios véreux, clubs miteux, etc.), mais il faut dire à leur décharge que dans certains cas la réalité dépasse souvent la fiction. D’autres, plus authentiques, décrivent avec une précision quasi documentaire certains milieux du jazz. En marge du polar, il existe aussi une vaste littérature (auto)biographique qui peut s’apparenter, tant sur le fond que sur la forme aux romans noirs de Raymond Chandler, comme Moins qu’un chien (Charlie Mingus) ou La rage de vivre (Milton « Mezz » Mezzrow). C'est de tout cela que je me propose de parler dans cette rubrique. A chaque fois, je m'efforcerai de présenter un polar-jazz (roman, biographie « noire » ou bédé). Toute idée ou suggestion sera bienvenue. |
Septembre 2006BOB GARCIALui écrire |