Jacques Chapreux (1), maître d’œuvre de la série « Les compagnons de Baal » (2), se vit proposer, par la direction de la défunte ORTF, d’adapter sous forme de série « Fantômas », série que réaliserait Georges Franju (3). Malheureusement, ce projet aussi ambitieux que passionnant n’aboutit pas : les droits sur ce personnage étant trop élevés. A la place, le spectateur dut se contenter des pitreries envahissantes d’un Louis de Funès.
Quant à Jacques Chapreux et Georges Franju, ils se rabattirent sur une œuvre originale, « L’Homme Sans Visage » (4), personnage à la croisée de Spiderman (5) et de Fantômas.
Un héros sous influence
Mais c’est bien à Fantômas, que l’ignoble Homme Sans Visage, emprunte tous les ingrédients qui le singularisent.
Roi de la métamorphose, le brigand change mille fois d’apparences, tantôt vieille mercière, tantôt puissant promoteur immobilier, il usurpe l’identité du neveu de sa victime ou se présente comme un styliste de mode.
De caves en galeries, de souterrains en porte dérobée qu’une simple pression dévoile, d’antres secrets en égouts parisiens, de toits en catacombes, il se déplace sans laisser de traces, surgissant là où personne ne l’attend, souvent escorté par sa fidèle Femme, déclinaison de la Lady Beltham de Fantômas.
Et pour assoir son pouvoir omniscient, il recourt aux technologies les plus innovantes : mur d’écrans de surveillance ; voitures téléguidées ; chirurgie neurologique…
Les outrages du temps
Certes, le spectateur du XXI siècle restera peut-être dubitatif face à Geraldine Chaplin qui observe plus son personnage qu’elle ne l’habite ou à Gert Froebe qui mime maladroitement un Golfinger de la PJ. Certains seront agacés par le jeu discutable de Patrick Préjean ou le peu de convictions d’Ugo Pagliai. Par contre, tous admireront la modernité de l’interprétation de Gayle Hunnicutt (6) ou la posture hallucinée de Clement Harari. Mais au final, chacun devra admettre qu’il est peu probable que certaines séries actuelles résistent aussi bien aux outrages du temps.
De la possible identité de l’Homme Sans Visage
Et si l’Homme Sans Visage n’était en fait que le Capital, celui qui rase les banlieues où résonne encore l’air des bals musettes pour y ériger des cités dites du bonheur ; celui qui transforme le béton en or ; celui qui se berce du bruit des marteaux piqueurs ; celui qui suce le sang des travailleurs immigrés et clandestins et ne rêve que d’ouvriers robots ?
Boutiquière usurière, aristocrate ou promoteur : L’Homme Sans Visage ne rêve que d’or sans sueur, tel le Capital d’argent sans travail.
1- Petit-fils de Louis Feuillade qui porta pour la première fois à l’écran le personnage de Fantômas.
2- 1968. 7 épisodes
3- Les Yeux sans visage (1968) ; Judex (1963
4- Parallèlement à ce tournage, Franju réalisa un long métrage « Nuit Rouge » qui reprend moult éléments de cette série.
5- En tendant le bras, l’homme sans visage peut éjecter une lame de couteau à la manière d’un Spiderman lançant ses filins. On retrouve des éléments graphiques sur la cagoule rouge qui évoquent ce personnage.
6- Elle incarnera Lady Beltham dans l'adaptation de Fantômas réalisée en 1980 pour avec Helmut BERGER dans le rôle-titre.L A
Le samedi 28 Mars 2015 |
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