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Jean Poiret : inspecteur Jean Lavardin || Stéphane Audran : Madame Cuno || Lucas Belvaux : Louis Cuno || Michel Bouquet : Hubert Lavoisier || Caroline Cellier : Anna Foscarie || Jean Topart : Docteur Philippe Morasseau || Pauline Lafont : Henriette || Josephine Chaplin : Delphine Morasseau || Jean-Claude Bouillaud : Gérard Filiol || Andrée Tainsy : Marthe || Jacques Frantz : Alexandre Duteil || Henri Attal : l'employé de la morgue || Marcel Guy : le maître d'hôtel || Dominique Zardi : Henri Rieutord, chef de poste || Jean-Marie Arnoux : le client du café |
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Poulet au vinaigre |
Retour à Claude Chabrol |
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Poulet au vinaigre |
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Dans une petite ville de la province, un jeune postier, au comportement curieux, et sa mère infirme, au comportement encore plus curieux subissent les assauts répétés de trois notables locaux pour accepter de vendre leur propriété. L’un de ces notables décède à la suite à un accident de voiture qui ressemble à un crime. L'inspecteur Jean Lavardin, amateur d’œufs au plat au paprika, débarque dans la ville pour mener l’enquête. Autour de cette affaire de magouilles immobilières, des morts et des disparitions mystérieuses s’accumulent sur fond de rancunes tenaces. |
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Quelques mots sur |
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Ce film, qui marque le retour de Claude Chabrol au succès critique après l’accueil mitigé du « Cheval d'orgueil » et « Le Sang des autres », est une adaptation de « Une mort en trop », roman de Dominique Roulet (1), même s’il semble évident que l’intrigue policière, autour de laquelle le cinéaste tisse son film, ait été réduite à minima. Dans une ville de province, trois notables, un médecin, un notaire et un boucher mettent sur pieds une société immobilière. Malheureusement, la famille Cuno, réduite à une mère (2) et son fils, refuse de vendre leur maison, pièce maîtresse du projet des trois notables. D’intimidation en mesquineries, le boucher meurt dans un accident de voiture. Et c’est à ce moment-là qu’apparait l’inspecteur Lavardin. Mais quarante minutes se sont écoulées, soit la quasi-moitié du film. Autant dire que son entrée en scène n’induit pas seulement une bifurcation narrative, mais aussi un infléchissement esthétique. Nombreux étaient les moments où la caméra filmait au travers des fenêtres (Image 3), se transformant en voyeuse, cherchant une mise au point pour deviner les complots qui se tramaient derrière les façades respectables ou au cours de réceptions champêtres (Image 1). Les conspirateurs se réunissaient à l’abri des regards, dans l’immense cave de leur pavillon les Cuno décachetaient le courrier des uns et des autres pendant qu’à la nuit venue le docteur s’en allait en quête de sacs de plâtre pour mouler des socles à ses statues aux formes féminines. Et cette représentation de la femme, objet sexuel et sensuel, immobile et immaculé, figée dans l’absence ou la mort (3), constitue le pivot autour duquel s’articule le film, pivot dont l’axe et partout et nulle part (Image 4). Ce climat oppressant et nocturne, l’inspecteur Lavardin va le balayer de sa distanciation ironique. L’heure n’est plus aux planques, mais aux virées coquines. Il a fallu que Lavardin jaillisse pour qu’Henriette contraigne Louis à accepter son invitation dans un restaurant gastronomique (4), l’obligeant par là même à enchaîner coup sur coup deux repas (5), à mentir à sa mère et à connaitre l’ivresse avant de plonger dans les délices de l’amour (6). Avec Lavardin le temps n’a plus le temps. « Ça peut tout faire, un flic ». Espionner un jeune postier et sa sculpturale amie, frapper ce même postier, forcer la porte de l’appartement d’une prostituée, téléphoner à un notable à cinq heures du matin pour lui maintenir la tête dans l’eau, saupoudrer ses œufs au plat de paprika et accélérer le rythme d’un film. Un flic, ça peut tout faire… quant à Claude Chabrol, il peut, comme par magie, introduire la troisième dimension dans la géométrie plane. Depuis son « invention », le cinéma s’est enrichi des attributs du réel : le muet est devenu parlant ; le noir et blanc couleur ; les écrans ont modifié leur surface et le son sa profondeur. Mais l’écran est demeuré plan, fût-il hémisphérique. Si le cinéma 3D constitue la dernière réponse pour dépasser cette limite (7), il en existe une depuis fort longtemps : la profondeur de champ. Mais ce procédé peut servir aussi à isoler un personnage ou un élément dans le cadre. Et Claude Chabrol l’utilise tantôt pour un résultat double, il extrait à la fois un visage du cadre et ajoute la profondeur au plan (Images 2 et 5), tantôt pour induire seulement l’idée de profondeur (Image 4). Mais la notion d’espace peut aussi être suggérée par le hors champ, c’est du moins ce que démontre la séquence finale du film où Claude Chabrol monte en parallèle trois actions qui se déroulent simultanément en des lieux différents : Lavardin découvre le cadavre de madame Morasseau (Image 6) ; madame Cuno met le feu à son pavillon (Image 7) ; Henriette prépare un petit déjeuner d’après galipettes à Louis (Image 8). L’espace n’est pas à l’écran, il est dans nos têtes en tant que persistance rétinienne du hors champ. 1- Auteur de polars et scénariste, il a réalisé en 1992 « L'Œil écarlate » avec Jean-Louis Trintignant. Un matin de septembre, au Pas-du-Loup, on retrouve le corps de Don Juan près de la voie ferrée. Il se serait en apparence suicidé, mais si oui, pourquoi ? C'est ce que va tenter d'éclaircir le commissaire René Montijoux au cours d'une enquête qui ne durera que quelques jours. 2- « La mère » Cuno est clouée sur un fauteuil roulant. Elle serait tombée dans les escaliers. Peut-être dans la « Muette » (« Paris vu par… »). 3- Madame Morasseau a disparu, Anna Foscarie disparait… toutes les deux sont mortes. Leurs corps se sont figés comme ceux des statues, l’une d’elles repose dans le socle de l’une de ces statues. 4- Elle le menace de révéler ce qu’elle sait à l’inspecteur. 5- La mère de Louis a préparé un repas pour l’anniversaire de son mariage : tomates antiboises, rôti de volaille sauce Morlaix 6- Louis disparait du cadre, entrainé Henriette, comme s’il plongeait réellement. 7- En 1922, le film américain « The Power of Love » est spécialement conçu en relief et le public dispose de lunettes spéciales (Wikipédia) |
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