Production: Transatlantic Pictures, Warner Bros, 1949. G.B Producteurs: Sidney Bernstein et Alfred Hitchcock. Producteurs managers: John Palmer et Fred Ahern. Réalisation: Alfred Hitchcock. Scénario: James Bridie, d'après le roman de Helen Simpson. Adaptation: Hume Cronyn. Directeur de la photographie: Jack Cardiff A. S, C etPaul Beeson, Ian Craig, David McNeilly, jack Haste. Décors: Tom Morahan. Musique: Richard Addinsell; dirigée par Louis Levy. Montage: AS, Bates. Costumes: Roger Furse. Couleurs en technicolor:. conseillers, Natalie Kalmus et Joan Bridge, Studios: M.G.M. à Elstree. Distribution: Warner Bros, 1949, 117 minutes. Interprétation: Ingrid Bergman (Lady Harrietta Flusky), joseph Cotten (Sam Flusky), Michael Wilding (Charles Adare), Margaret Leighton (Milly), jack Watting (Winter, le secrétaire de Flusky), Cecil Parker (Sir Richard, le gouverneur), Denis O'Dea (Corrigan, le procureur général), et Olive Sloan, John Ruddock, Bill Shine, Victor Lucas, Ronald Adam, G.H Mulcaster, Maureen Delaney, Julia Lang, Betty McDermot, Roderick Lovell, Francis de Wolff. |
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Synopsis |
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La ville de Sydney (Australie) accueille, en grande pompe, son nouveau gouverneur. Charles Adare, le neveu de celui-ci, débarque lui aussi sur les terres australes avec la ferme intention d’y faire fortune. Alors qu’il se rend à la banque, il rencontre Sam Flusky et sympathise très vite avec lui. En tant qu’"émancipé" (un forçat qui a purgé sa peine), Flusky n’a pas le droit d’acheter des terres, aussi propose-t-il à Charles de lui servir d'intermédiaire. Afin de sceller l’affaire Flusky invite Adare à dîner. Dans la somptueuse demeure de Sam Flusky, tous les personnages influents de la ville ont répondu à l’invitation, par contre leurs épouses ne l‘ont pas honorée… Au milieu du repas, Harrietta Flusky fait son apparition. Elle se déplace pieds nus et visiblement sous l’emprise de l’alcool. Charles Adare est peiné de découvrir cette ancienne amie d’Irlande dans cet état. Face au désarroi de Charles Adare, Sam Flusky décide de se confier. Lorsqu’il avait connu Harrietta, il était son palefrenier et c’est parce qu’il avait tué son frère, qui s'opposait à leur union, qu’il avait été condamné à 10 ans de bagne. La jeune femme l’avait suivi en Australie et avait attendu sa libération. Charles décide de redonner confiance à Harrietta… Entre les deux hommes, la sympathie cède la place à la jalousie |
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Du rythme |
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Avec ce film, qui vient après "La Corde", Hitchcock renouvelle son expérience de longs plans qui durent le temps d’une bobine, soit une dizaine de minutes. Ce choix n’a pas été sans conséquences, tant sur le plan esthétique, que technique. En premier lieu, il a fallu concevoir des décors amovibles afin de permettre les mouvements de la caméra. Par exemple, la table autour de laquelle s’assoient les convives de Sam Flusky, lors du repas que celui-ci offre en l’honneur de Charles Adare, est constituée de plusieurs éléments amovibles que les acteurs écartent pour laisser passer la caméra lorsqu’il s’agissait de ne cadrer qu’un ou deux convives. Mais la conséquence essentielle de ce choix est la parfaite adéquation entre le fond et la forme. Les Flusky ont été chassés d’Irlande et expédiés en Australie pour y expier leurs fautes, qui ne sont originellement que le péché de chair. Lorsque le film commence Lady Harrietta Flusky a rejoint son enfer depuis de longues années et c’est l’histoire de sa lente dégradation que nous narre "Les amants du capricorne". Elle glisse inexorablement vers les tréfonds de la déchéance, au rythme fluide des scènes qu’induit le choix de longs plans. Rien ne semble pouvoir arrêter la dégringolade d’Harrietta que les remords et mélancolie rongent. Rien si ce n’est la vérité… Et le film change brusquement de rythme. Le montage reprend le dessus : Harrietta était victime d’un empoisonnement progressif, d’une gouvernante malfaisante. Ce n’est ni la parole (confession), ni les sentiments (amour) qui permettent à l’héroïne de se libère de l’emprise de son passé, de sa faute (de gagner de nouveau le paradis) mais les faits. Harrietta voit la gouvernante Milly verser du poison dans un verre… Et le verre envahit l’écran tout comme l’évidence s’impose à Harrietta |
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Du chef-d'oeuvre inconnu |
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Après l’énorme succès de « La Corde », Hitchcock se lance dans la réalisation des « Amants du Capricorne », un projet qu’il veut grandiose, totalement construit autour d’Ingrid Bergman. Malheureusement le film est un échec commercial qui le contraint à liquider sa société de production. « II nous a fallu attendre cent cinq minutes pour avoir un premier frisson dans ce film »(1), écrivit un journaliste du Hollywood Reporter, faisant référence à la scène où Ingrid Bergman découvre une tête de mort dans son lit. Hitchcock en éprouva beaucoup d’amertume : « nous avons mis trop d'enthousiasme dans cette entreprise pour ne pas ressentir avec une certaine honte le fait que tout cela n'ait abouti à rien. » (1) Mais il ne peut rien face à la critique et au jugement du public décontenancé par ce film en costume et fort atypique dans sa filmographie ? Mais « l’histoire » n’a dit son dernier mot. En effet, de l’autre côté de l’Atlantique, une bande de jeunes critiques français se prépare à intervenir. « On aimait Hitchcock pour le mauvais motif, nous dit, le suspense... Comment ne pas être déconcerté par un film qui rejoint avec une aisance stupéfiante un leitmotiv fondamental de la littérature universelle ? (…)Hitchcock, opte ici, délibérément, et comme toujours, pour le ciel et contre l'enfer ; mais, à la différence de ses autres films, il accorde au ciel une très grande place... Under Capricorn constitue l'exacte réciproque de ses films « noirs ». Le thème fondamental du a secret qui lie une conscience à une autre, est le point de départ d'une entreprise, non d'asservissement, mais de libération » (2) Jean Domarchi. « Le sujet secret de ce drame est la confession, la délivrance du secret prise dans sa double acceptation : au sens psychanalytique, car elle délivre du souvenir en lui donnant un corps verbal, comme au sens religieux ; et l'aveu des fautes équivaut à leur rachat. (…) Le transfert de la responsabilité du péché scinda jadis le couple, l'un assumant la peine, l'autre la mauvaise conscience ; ce premier sacrifice mal consenti les oblige à s'abandonner à l'ivresse d'autres mutuels sacrifices incessamment renouvelés, et il ne leur sera pas possible de renoncer au sacrifice, pour accepter le bonheur, sans qu'un troisième ne doive à son tour assumer ce sacrifice. » (2) Jacques Rivette Quant à Rohmer et Chabrol ils diront, en parlant des instants qui suivent la scène où Milly cache sous les couvertures du lit d’Harrietta : « Elle vaut l’un des gros plans les plus chargés de sens de toute l’histoire du cinéma.(…) Un très gros plan nous montre alors Harrietta entrouvrant une paupière lourde, et son visage exprime, en un instant, un tel luxe de sentiments divers (crainte et maîtrise de soi, candeur et calcul, rage et résignation) que la plume la plus concise perdrait plusieurs pages à l'exprimer. En fait, nous ne croyons pas ces quelques secondes moins extraordinaires que ce passage de Dostoïewski où le héros de Krotkaïa, ayant ouvert un œil machinal, tandis que sa femme braquait sur sa tempe un revolver, se demande si celle-ci sait qu'il l'a vue, ou simplement attribue le battement de ses paupières à un geste habituel au dormeur. Ainsi le romancier et le cinéaste ont-il su, l'un par le commentaire, l'autre par le génie propre à son art, pourvoir de la signification la plus subtile et la plus riche une donnée qui n’est pas moins mélodramatique dans le premier cas que dans le second » (2). (1) Dans Hitchcock-Truffaut (2) Dans Rohmer-Chabrol |