Jake Scully : Craig Wasson || Holly : Melanie Griffith || Sam : Gregg Henry || Gloria Revelle : Deborah Shelton || Jim McLean : Guy Boyd || Rubin : Dennis Franz || le professeur de théâtre : David Haskell || le vendeur de vidéos : Douglas Warhit || l'assistant réalisateur : Larry Jenkins || l'actrice du film de vampires : Denise Loveday || un agent de police : Ray Hassett || un agent de police : Jerry Brutsche || le caméraman : Rob Paulsen || le metteur en scène de théâtre : Jeremy Lawrence || le réalisateur TV : Rod Loomis || l'assistante de production : Marcia Del Mar || le jogger : Chuck Waters || le portier qui chante : Holly Johnson || l'assistant réalisateur : Steven Bauer (non crédité) || lui-même : Paul Rutherford (non crédité) || une fille aux toilettes : Brinke Stevens (non crédité) || Kimberly Hess : Rebecca Stanley || Corso : Al Israel || Douglas : B.J. Jones || Frank : Russ Marin || Billy : Lane Davies || Carol : Barbara Crampton || Sid Goldberg : Monty Landis |
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Synopsis |
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Jake Scully est un acteur que sa claustrophobie empêche de jouer le rôle de vampire. Il est aussi un acteur sans domicile : sa petite amie, qui le trompait, vient de le chasser. Alors, il n’a pas d’autre choix que d’accepter la proposition que lui fait Sam Bouchard et de faire du gardiennage. Surtout que la place n’est pas sans intérêt, dans la maison d’en face, chaque soir, la voisine se livre à un strip-tease devant sa fenêtre. Jake, qui n’en rate pas une miette, remarque un étrange Indien qui lui aussi observe la jeune femme. Le lendemain, alors qu’il piste sa voisine, il localise de nouveau l’Indien. Et, lorsque celui-ci dérobe le sac à la jeune femme, il se lance à sa poursuite. Malheureusement sa phobie lui interdit d’aller plus avant dans le tunnel où s’est engouffré l’agresseur. Après des embrassades, dont on se demande si elles ne sont pas imaginaires, Jake regagne son domicile et se poste de nouveau derrière sa lunette. Dans la maison d’en face, l’Indien se prépare à assassiner sa charmante voisine. Jake aura beau courir il ne parviendra pas à la sauver… Quelque temps plus tard, alors qu’il regarde un porno à la télé, il reconnaît sur la fesse gauche d’une actrice le tatouage que portait sa voisine! |
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De ce qui est donné à voir |
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Si la fiction cinématographique est une histoire comprise entre un début et une fin, entre deux génériques, alors qu’est « Body Double » ? Une fiction dans la fiction, le réel dans la fiction ou la fiction dans le réel? Les premières images, qui envahissent l’écran, sont celles du film « Le Baiser du vampire », un film que tourne Jon Rubin -probablement rescapé de Hi Mom-, un film qui ne sera achevé qu’aux derniers instants, si l’on se réfère aux ultimes images. Entre ces deux moments, à l’extérieur de ces images de vampire, serait donc le réel. Les choses seraient simples s’il n’y avait encore et toujours le cinéma, si Scully ne tenait pas le rôle principal d’une multitude de films ou de genres. Et c’est ainsi que Scully endosse le rôle de James Stewart dans un remake sexuel de « Fenêtre sur cour » en braquant ses yeux sur l’appartement de « la petite danseuse que les hommes convoitent ». Et c’est ainsi, que durant un court moment, il incarne un amoureux enlaçant une Scarlett O'Hara ressuscitée, avant de plonger corps et âme dans un film pornographique aux côtes de la sulfureuse Holly. Et c’est ainsi, qu’entre deux scènes canailles il devient la vedette très « Relax » d’un vidéoclip. Et c’est ainsi qu’à l’image du Scottie de « Vertigo » il part en quête de la femme « D'entre les morts » après avoir assisté à la projection d’un « Crime était presque parfait » qui tournerait à l’avantage du tueur. Et c’est ainsi, qu’au terme d’un travelling compensé thérapeutique, il peut enfiler le costume d’un Norman Bates apaisé, se glisser sous la douche, et caresser sa partenaire. Mais « Body Double » est bien plus que ce jeu de cache-cache entre réel et fiction, que cette collection de matriochkas, il est le noyau de l’esthétique de Brian de Palma. Si au commencement était le verbe voir et sa cohorte de synonymes, alors Body Double est au centre, de l’œuvre du cinéaste. Regarder, voir, saisir, s’approprier, comprendre… Mais que peut-on voir? Rien de plus que ce qui est donné à voir. Alexander Revelle propose à Jake Scully de l’héberger dans un étrange appartement qui niche au haut d’un tour. Et, il lui indique immédiatement, ce qu’il doit regarder : la voisine d’en face qui tous les soirs, avant de se coucher, esquisse, devant sa fenêtre, une danse érotique des plus suggestive. A partir de cet instant, Scully ne verra plus que la nudité de sa voisine, que ce que Revelle lui a donné à voir. Il voit sa voisine et un inquiétant Indien; il épie cette femme dans une cabine d’essayage; il aperçoit la culotte qu’elle jette dans une corbeille ; il découvre, dans son téléobjectif, l’indien qui se dresse dans le dos de cette femme avec une perceuse à la main Il voit le meurtre de sa voisine; il voit l’assassin… Mais à trop voir, il est aveuglé et ne peut pas discerner les anomalies qui entourent ce réel qui s’offre à lui. N’est-ce pas extraordinaire que chaque soir sa voisine esquisse, devant sa fenêtre une danse érotique, telle une danseuse de cabaret? N’est-il pas étonnant que le chien qui monte la garde dans la demeure de cette femme soit resté impassible lorsque le meurtrier s’y est introduit? A la différence de James Stewart qui, dans « Fenêtre sur cour », ne voit rien du meurtre, mais comprend tout, Scully voit tout du meurtre et de ses préparatifs mais ne comprend rien. Ceci ne résulte-t-il pas du fait que ce qu’il voit lui a été donné à voir? Que de ce fait son champ visuel est atrophié, sous l’effet des images de sa voisine ainsi que par ses crises de claustrophobie? En fait ce n’est pas de claustrophobie dont souffre Scully mais d’un trouble de la vision, un trouble que cause aussi bien sa phobie que son voyeurisme latent. Et la guérison de l’une passera par l’affranchissement de l’autre. On le perçoit dès les premières minutes du film, lorsque Scully rentre chez lui à l’improviste. Il surprend, au moment crucial, sa femme dans les bras de son amant. Leurs regards se croisent, et Scully pénètre dans un bar. Il vient de comprendre que sa vie passée est terminée car il vient de voir ce qui ne lui était pas donné à voir. Plus tard, après que sa voisine est été assassinée, alors qu’il n’a plus rien à voir, il regarde sur un écran télé « Holly se fait Hollywood » et devine dans l’actrice porno la doublure de sa voisine. Une fois de plus son regard s’est débarrassé des œillères et il peut enfin comprendre les dessous de l’affaire. Dans « Blow Out » De Palma soutenait la thèse que la réalité n’est insaisissable que parce qu’elle est dissimulée au profit des « puissances », avec ce film il affine et élargit son propos en soulignant qu’il n’est pas toujours utile de cacher le réel pour le rendre inintelligible, qu’il suffit souvent de le sur exposer, propos qu’il déclinera dans une multitude de films à venir. |