Une femme au volant de son break demande sa route aux passants… s’ils vivent seuls, elle propose de les conduire : tous acceptent.
Plan fixe après plan fixe, peut-être parce que la vie ne connait ni champ ni contre-champ, ni zoom ni traveling, elle arrache le quidam à son ennui, à sa solitude ou à cette multitude qui arpente les trottoirs, traverse la chaussée ou s’engouffre dans les commerces aux vitrines réfléchissantes. Elle les subjugue et les ravit avant de les projeter dans l’écran noir de leurs désirs.
Beauté fatale, elle fixe longuement les hommes, insensible à leur aspect, à leur pulsion, à leur vie. Elle n’est que l’image de la femme parfaite, celle qui hante le papier glacé des magazines de luxe ou les écrans blancs et illusoires de l’évasion. Elle n’est que le rêve d’une vie ailleurs dans un univers projeté en 24 images par seconde.
Elle est la star inaccessible croisée dans le rejet d’une devanture, l’icône ornant les espérances qui illuminent la grisaille des vies ordinaires.
Insaisissable, il ne faut tenter ni de la saisir, ni de la soumettre sous peine que l’être réel qu’elle renferme s’évade… sous peine de détruire l’icône, sous peine de la brûler.
L A
