La carrière de Cy Endfield, le réalisateur de ce film, débuta dans les années 40. En 1950, il se fit remarquer tournant « Fureur sur la ville », un film, basé sur une histoire vraie, qui mettait en scène un lynchage. L’année suivante, il fut cité comme communiste à une audition devant la Commission des activités anti-américaines et mis sur la liste noire. Interdit de travail à Hollywood, il s’exila au Royaume-Uni où il réalisa divers films, parmi lesquels « Train d'enfer » (Hell Drivers).


Tom Yately est embauché dans une entreprise de transport routier où règne une concurrence féroce entre employés qui se disputent les primes de rendement.


Certains pourront reprocher au scénario de ce film de sombrer dans les stéréotypes :

? L’amitié entre Tom, le mystérieux, et Giono, le sensible.
? L’amour de Lucy envers Tom qui ne peut que la repousser puisqu’il sait Gino épris de la belle.
? Le passé de repris de justice de Tom
? La rancœur de la mère de Tom
? La mort de Gino
? La folie caricaturale de Red
? La fin, pour le moins bâclée.


Mais qu’importe puisque le sujet du film n’est nulle part dans ces poncifs. « Hell Drivers » n’est ni une histoire d’amour, ni une histoire d’amitié, ni une histoire de réinsertion-rédemption.
Cy Endfield filme les rapports de production, la violence qu’ils induisent dans les rapports sociaux.
A coup de cuts nerveux, de plans sur les routes sinueuses et boueuses qu’empruntent les camionneurs tenus au rendement maximal, il capte la désagrégation des relations humaines. Le camionneur n’est plus que l’appendice de son camion de qui dépend sa vie. Red, celui qui semble plus fou du groupe, mais n’est que le garde chiot du capital, exacerbe les faux antagonismes en passant toujours en force, car il sait que les camionneurs protégeront leur véhicule.
Cy Endfield filme la classe ouvrière en soi, celle qui n’imagine pas qu’elle pourrait existe pour soi. Et l’exploitation patronale disparait derrière l’auto exploitation basée sur l’illusion que les ouvriers n’ont que des intérêts antinomiques.
Cy Endfield filme son sujet au plus près, en embarquant sa caméra dans la cabine des camions, en alternant des plans sur les machines et les hommes, en suivant les incessants aller-retour des camions, en dessinant les groupes et les sous-groupes qui se cristallisent, en occultant le patron et en lui substituant le personnage de Red.


Visionner ce film constitue donc un véritable plaisir et ceci d’autant plus qu’on y découvre des acteurs devenus depuis lors célèbres :

? Patrick McGoohan (« Le Prisonnier », « L’évadé d’Alcatra »z)
? David McCallum (« La Grande évasion », « Des Agents très spéciaux »)
Et
? Sean Connery

L A